Face à l’envolée de la vente d’appareils de
climatisation en France, l’Apur propose un premier diagnostic de
la présence de la climatisation à Paris. Étant donné
sa densité bâtie, Paris connaît un îlot de chaleur
qui amplifie localement les effets du changement climatique. La climatisation
est vue pour beaucoup comme une solution technique face à l’inhabilité
croissante des bâtiments à Paris. Ce premier volet de l’étude
de l’Apur dresse un panorama de la présence de la climatisation
à Paris, il rappelle les différentes technologies employées
et recense les modes d’intégration aux bâtiments. Les
nuisances associées à la climatisation sont également
analysées, en particulier les rejets de chaleur.
Les
principales techniques de climatisation existantes à Paris |
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Terminologie
Climatisation,
refroidissement, rafraîchissement, voici trois termes qui
sont généralement employés comme des synonymes
dans le langage courant. Dans la littérature scientifique
et technique, ces termes recouvrent des mécanismes légèrement
différents que nous pouvons rappeler brièvement.
La climatisation est le procédé qui répond
aux exigences les plus fortes en termes d’usage, elle est
employée pour maintenir un local dans des conditions de
température et hygrométrie sans qu’aucune
dérive ne soit tolérée. Son application concerne
l’industrie de précision, les laboratoires, les salles
d’opération…
Le refroidissement est le procédé qui permet l’atteinte
d’une température donnée avec une certaine
tolérance - généralement plus ou moins 1
°C - dépendant du dimensionnement des systèmes
présents dans le bâtiment. Son application concerne
notamment les bureaux.
Le rafraîchissement est un procédé qui permet
de rendre l’air intérieur plus frais que l’air
extérieur de quelques degrés. La température
intérieure n’est donc pas garantie dans l’absolu.
Les systèmes de rafraîchissements sont généralement
utilisés dans des bâtiments relevant d’une
conception bioclimatique, c’est-à-dire une conception
permettant de garantir un confort intérieur suffisant sans
recours aux énergies l’essentiel du temps. Le rafraîchissement
aide le bâtiment à passer certains pics d’inconforts.
Le rafraîchissement est principalement utilisé dans
le logement ou certains équipements.
Dans la plupart des documents que nous avons précédemment
cités et qui sont issus de la bibliographie, le terme de
climatisation recouvre les trois procédés
que nous avons évoqués ci-dessus. Il s’agit
d’une simplification extrêmement courante, que nous
emploierons également dans la suite du document.
Les
grandes familles de climatiseurs présentes à Paris
Les
différents systèmes de climatisation employés
dans les bâtiments reposent sur la technique de la pompe
à chaleur qui permet d’évacuer les calories
d’un local à l’extérieur grâce
à un fluide frigorigène. Schématiquement,
tout se passe comme dans un réfrigérateur, un fluide
frigorigène circule dans une tuyauterie en circuit fermé.
Ce fluide est évaporé dans les locaux à rafraîchir,
et est ensuite condensé à l’extérieur
du local, ce qui provoque une émission de chaleur. Tout
comme un réfrigérateur réchauffe la pièce
dans laquelle il se trouve, un climatiseur réchauffe l’air
extérieur à proximité des bâtiments
qu’il climatise. Les 4 principales nuisances liées
à la climatisation sont :
-
la consommation d’électricité,
-
le bruit des moteurs,
-
les pertes de fluides frigorigènes qui sont des gaz
volatils qui auront donc
tendance à s’échapper du système
et qui sont également des puissants gaz à effet
de serre,
-
l’augmentation de la chaleur en ville puisque la climatisation
émet de la
chaleur à l’extérieur des bâtiments.
Il
existe de nombreuses technologies de climatisation, qui sont choisies
selon les types de bâtiment qu’elles servent à
climatiser. La liste qui suit n’est pas exhaustive, elle
tente de lister les différents types de climatiseurs que
l’on peut observer à Paris.
Climatisation
d’appoint
Les climatiseurs mobiles connaissent un grand succès
actuellement. Ils sont achetés notamment dans les magasins
de bricolage. Ils permettent de refroidir des petits volumes,
comme une chambre dans un appartement, ou un petit local commercial.
Ils sont principalement utilisés lors des vagues de chaleur
extrêmes, donc de façon intermittente. Leur grand
succès tient à leur souplesse d’usage, n’importe
qui peut s’en procurer, et aucune autorisation d’urbanisme
n’est nécessaire, puisque leur usage n’implique
pas de transformation du bâtiment. Leur moindre efficacité
tient dans le fait qu’ils sont souvent employés portes
ou fenêtres ouvertes. Il convient de noter que, depuis le
25 juillet 2022, un arrêté de la Maire de Paris oblige
le maintien des portes ou vitres fermées pour les établissements
commerciaux ou de service lorsqu’ils sont climatisés,
ce qui permet de lutter contre l’usage de climatiseurs mobiles.
Les climatiseurs de fenêtres sont monoblocs, c’est-à-dire
qu’ils sont constitués d’une seule unité
qui doit être intégrée au vitrage, moyennant
généralement une dégradation des performances
thermiques de l’enveloppe du bâtiment. Ces climatiseurs
sont de moins en moins employés aujourd’hui, car
trop contraignant et trop bruyant.
La
climatisation à eau perdue utilise les frigories du
réseau d’eau potable pour le rafraîchissement
des locaux. La climatisation à eau perdue est vraisemblablement
très développée à Paris : elle est
relativement simple à mettre en œuvre, et elle ne
nécessite pas d’unité extérieure. Néanmoins,
cette technique a un coût économique et écologique
très important, puisqu’elle consomme de l’eau
potable, qui est ensuite rejetée dans le réseau
d’égout. Notons également que la performance
de ces systèmes n’est pas garantie : elle est très
dépendante de la température de l’eau de réseau,
qui peut dépasser les 25 °C, alors que la température
de rejet est limitée à 30 °C du point de vue
légal, dans ce cas la performance du système devient
très faible. Une variante de cette technique, qui emploie
le réseau d’eau non potable, existe à Paris,
elle n’est employée aujourd’hui que dans quelques
bâtiments ; dans ce cas, le coût écologique
est moindre, puisque l’eau non potable dont on prélève
les frigories est réinjectée dans le réseau
d’eau non potable.

*Cas
défavorable d’une température de réseau
élevée (env. 25°C)
Source : Elioth - Étude sur le développement de
la climatisation à Paris (2013) / © Apur - mars 2025

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Climatiseur mobile fonctionnant avec la fenêtre du
commerce ouverte,
rue du Faubourg-Montmartre (IXe) © Apur –
Emmanuelle Roux

Climatiseur de fenêtre intégré à
la devanture d’un commerce, avenue du Maine (XIVe)
© Apur – Julien Bigorgne |
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Climatiseur
split dédié à la climatisation
du local en rez-de-chaussée (XIXe) |

Climatiseurs
Rooftop au parc des expositions de la porte de Versailles (XVe) |
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Climatisation
centralisée
Dans
cette catégorie sont regroupés les systèmes
dédiés à la climatisation des locaux uniques
: un logement, un commerce, un entrepôt.
Les climatiseurs split ou multisplit requièrent
une unité présente à l’extérieur
qui est reliée à une (split) ou plusieurs unités
(multisplit), à l’intérieur des locaux, et
qui sont chargées d’émettre de l’air
froid dans les différentes pièces. Ces climatiseurs
sont donc aptes à refroidir des logements entiers, ou des
commerces entiers. Il peut être nécessaire de recourir
à plusieurs unités extérieures pour les grands
locaux.
Les Rooftops sont utilisés pour refroidir de très
grands volumes, surtout quand ils sont peu cloisonnés,
comme les halls d’exposition, mais aussi les entrepôts,
les supermarchés. Les unités de production d’air
froid sont placées en toiture et insufflent dans les locaux
l’air à la température voulue. Ces systèmes
doivent être très réactifs pour s’adapter
rapidement aux pics de fréquentation des locaux qu’ils
refroidissent.
Climatisation
décentralisée
Dans
cette catégorie sont regroupés les systèmes
dédiés à la climatisation de bâtiments
entiers comme les bâtiments de bureaux ou les équipements.
Les systèmes décentralisés sont plus économes
que les systèmes centralisés quand il s’agit
de climatiser des grandes surfaces, ils réalisent des économies
d’échelle en évitant la multiplication d’unités
individuelles sur chaque fenêtre.
Systèmes
à détente directe
Les systèmes à Débit de Réfrigérant
Variable (DRV) sont parmi les plus répandus dans les
bâtiments de bureaux ou l’hôtellerie. Cette
technologie permet notamment de produire du froid et du chaud
simultanément, selon les besoins des différents
locaux du bâtiment, grâce à la circulation
des fluides frigorigènes dans tout le bâtiment. L’atout
de ces systèmes est leur grande réactivité
aux variations de température. Ces systèmes sont
théoriquement destinés aux petites surfaces (<1
000 m²), mais il est courant de les rencontrer dans des bâtiments
aux surfaces parfois importantes, dans ce cas plusieurs réseaux
DRV sont nécessaires. Le principal inconvénient
de ces systèmes réside dans les grands linéaires
où circulent les fluides frigorigènes, ce qui multiplie
les risques de fuite. Or les fluides frigorigènes sont
de puissants gaz à effet de serre.
Systèmes à détente indirecte, c’est-à-dire
utilisant un système d’eau glacée à
l’intérieur pour véhiculer les frigories
Les groupes à Eau Glacée (ou Chiller) regroupent
des systèmes comme les Aéro-Condenseur (ou Dry Cooler),
les Tour Aéroréfrigérantes (TAR). Ces systèmes
sont extrêmement puissants, et sont adaptés aux très
grands programmes de bureaux par exemple. Ces systèmes
prennent systématiquement place sur les toitures, et alimentent
un système d’eau glacée interne au bâtiment.
La plupart de ces systèmes consomment également
de l’eau de réseau pour améliorer leur refroidissement,
ce qui a l’avantage de faire baisser les rejets de chaleur
dans l’air ambiant, mais moyennant une consommation d’eau.
Trois
modules de climatiseurs à Débit de Réfrigérant
Variable (DRV) sur le toit d’un hôtel,
rue de Reuilly (XIIe) ©
Christophe Jacquet – Ville de Paris
Le
réseau de froid urbain Fraîcheur de Paris
est le système le plus décentralisé, puisque
quelques usines de production permettent d’alimenter des
quartiers entiers en froid. L’eau glacée est utilisée
pour véhiculer les frigories, qui sont acheminées
via un système de canalisations situées sous les
trottoirs. Les canalisations relient les sites de production aux
bâtiments des clients du réseau.
La production se base notamment sur une valorisation énergétique
de l’eau de Seine - aquathermie - qui apporte de très
bons rendements. Cette production est complétée
de moyens plus classiques comme les tours aéroréfrigérantes.
La
géothermie sur nappe : contrairement aux techniques
qui utilisent l’air comme refroidisseur, la géothermie
utilise la fraîcheur d’une nappe en sous-sol. Cette
technologie est l’une des plus performante du point de vue
écologique, elle est notamment employée dans le
secteur Paris Nord Est (PNE) à Paris. La géothermie
permet généralement le rafraîchissement des
locaux. Dans le cas du secteur PNE, la géothermie est complétée
de Groupes Froids, fonctionnant à l’électricité
pour pouvoir proposer du refroidissement.
Aéro-Condenseur
(Dry Cooler) sur le toit d’un bâtiment de logement
social
Le climatiseur sert aux commerces situés au rez-de-chaussée,
Orgues de Flandres RIVP (XIXe) ©
Christophe Jacquet – Ville de Paris |
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.Étude
La climatisation à Paris
Formes,
insertions, nuances
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Avec le changement climatique,
la hausse des températures observée
à la période estivale et les pics durant
les canicules, la demande de froid se déploie
en France à grande échelle. Dans les
métropoles, cette diffusion massive et rapide
pose plusieurs questions dont l’enjeu des systèmes
de production, leurs différentes formes, leurs
insertions et les nuisances qui découlent de
leurs usages.
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Directeur
et directrice de la publication : Alexandre LABASSE
- Patricia PELLOUX
Étude réalisée par : Julien
BIGORGNE - Sous la direction de : Olivier RICHARD
Avec le concours de : Pauline ALFARO, Maud CHARASSON,
Gabriel SENEGAS
Cartographie et traitement statistique : Apur
L’Apur,
Atelier parisien d’urbanisme, est une association
loi 1901 qui réunit autour de ses membres fondateurs,
la Ville de Paris et l’État, les acteurs
de la Métropole du Grand Paris. Ses partenaires
sont : |
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