Ce projet de manifeste est un point d’étape, la base à
partir de laquelle nous réfléchissons à des solutions
pertinentes pour sauvegarder nos
forêts. Ce n’est pas simple, toutes les forêts d’Île-de-France
ne se ressemblent pas. Elles ont des statuts et des fonctions différentes.
67 % de nos forêts sont des forêts privées, celles
qui sont en zone urbaine dense ne peuvent pas être traitées
comme les autres…
Cette complexité demande que l’on prête attention au
contexte, que l’on identifie les menaces, que l’on analyse
les conflits
d’usages. Au plus près du terrain, nos associations sont
particulièrement bien placées pour le faire
et pour coélaborer les politiques publiques nécessaires.
Constats et propositions.
Panorama
de la gestion de la forêt francilienne |
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Le
Code forestier
Les
forêts, bois et arbres sont reconnus d’intérêt
général. La politique forestière relève
de la compétence de l’État en concertation
avec les collectivités territoriales. Le Code forestier
cadre les principes d’une gestion durable et multifonctionnelle
des forêts pour leur diversité biologique, leur
productivité, leur capacité de régénération,
leur vitalité et leurs fonctions écologiques, économiques
et sociales.
Les
Programmes de l’État de la forêt et du bois
Au
niveau national : le Programme national de la forêt et du
bois 2016-2026 précise les orientations de la politique
forestière en forêt publique et privée et
ses objectifs économiques, environnementaux et sociaux
: Loi d’avenir pour l’agriculture, l’alimentation
et la forêt du 13 octobre 2014 - décret du 8 février
2017.
Au niveau régional : le Programme régional de
la forêt et du bois 2019-2029 d’Île-de-France
- arrêté le 21 janvier 2020 - cadre la politique
forestière régionale :
-
gestion
dynamique, durable et multifonctionnelle dans un contexte
de changement climatique,
-
compétitivité
et emploi de la filière bois,
-
soutien
aux dynamiques territoriales,
-
réponse
aux attentes sociétales en matière de nature,
de paysage et d’accueil du public,
-
communication
sur la gestion forestière, la biodiversité,
la filière forêt-bois et ses métiers.
La
Directive régionale d’aménagement pour les
forêts domaniales et le Schéma régional d’aménagement
pour les forêts des collectivités sont le cadre de
référence de leur gestion durable.
Zoom
sur les forêts publiques
Elles
relèvent du régime forestier :
-
Les
forêts domaniales gérées par l’Office
national des forêts (ONF).
Missions : produire du bois, préserver l’environnement,
accueillir le public et prévenir les risques naturels.
Gestion : futaies irrégulières, structures
de concertation informelles sur le territoire : comité
de forêt, comité de massif, charte forestière
de territoire.
-
Les
forêts régionales gérées par Île-de-France
Nature pour le compte de la Région. Missions
: accueillir le public, préserver la biodiversité,
renouveler les peuplements. Gestion : sylviculture
à couvert continu, intervention arbre par arbre, régénération
naturelle privilégiée.
-
Les
forêts communales gérées par l’ONF
: convention 2022-2025 entre la Fédération nationale
des communes forestières et l’ONF.
Zoom
sur les forêts privées
Le
Centre national de la propriété forestière
(CNPF) délégation Île-de-France/Centre-Val
de Loire est l’organisme responsable pour agréer
un document de gestion en forêt privée : plan simple
de gestion, code de bonne pratique sylvicole ou règlement
type de gestion. Il se réfère pour cela au Schéma
régional de gestion sylvicole défini par le Code
forestier et précise, notamment, les méthodes de
gestion préconisées.
Signé le 4 décembre 2023, il comporte des avancées
en matière de libre évolution, d’équilibre
sylvo-cynégétique, de choix d’essences, de
coupes rases et d’itinéraires techniques.
L’implication
de la Région Île-de-France pour l’avenir des
forêts franciliennes
Les
quatre axes de la stratégie régionale à l’horizon
2030 pour la forêt et le bois, votée le 20 septembre
2023 :
-
fédérer
les acteurs forestiers et la société civile
face aux dérèglements climatiques,
-
développer
les entreprises de la filière,
-
développer
emplois et compétences,
-
constituer
un pôle d’innovations pour la forêt et le
bois français.
Le
Pacte pour l’avenir des forêts privées franciliennes,
signé entre la Région Île-de-France, le CNPF,
le syndicat Fransylva, la chambre d’agriculture et l’interprofession
Fibois le 30 novembre 2023, a trois objectifs :
- augmenter
les surfaces de forêts privées pratiquant la gestion
durable,
- participer
au déploiement du fonds forestier francilien : contribution
à la démarche de l’association Sylv’acctes,
- prévenir
et traiter les risques - incendie - et les conflits avec riverains
et usagers.
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Jane
Buisson, pilote du groupe de travail Agriculture-Forêt de
FNE Île-de-France |
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Un
modèle de gestion sylvicole fondé sur la nature |
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©
Agence Taurine / Adobestock - Grandfailure |
Benoit
Méheux, ingénieur forestier chez Pro Silva France,
nous présente une méthode de gestion sylvicole permettant
de produire du bois et de veiller à la survie des peuplements
face aux différentes menaces.
Quels
sont les objectifs de la sylviculture mélangée à
couvert continu (SMCC) et comment propose-t-elle d’y parvenir
?
La
notion de SMCC est définie par le programme européen
ASKAFOR, dont le but est de rassembler des pratiques sylvicoles
proches - futaie irrégulière, futaie jardinée…
- autour d’une notion facilement accessible. Toutes ces
pratiques partagent des objectifs communs : elles se fondent sur
des dynamiques naturelles, recherchent la réalisation de
l’ensemble des services écosystémiques - production,
support, régulation et socioculturels -, une production
de gros bois de qualité, et s’assurent de maîtriser
les investissements. L’objectif est donc de faire le mieux
possible avec le moins possible, en s’appuyant sur une forêt
résiliente, c’est-à-dire capable de supporter
des risques : le changement climatique, les tempêtes, les
insectes…
Les principes de gestion découlent de ces objectifs, les
plus emblématiques sont le mélange d’essences
et la permanence d’un couvert forestier, bien qu’on
puisse accepter de petites trouées. Le référentiel
décrit aussi plusieurs principes associés aux dynamiques
naturelles, à la conservation des structures associées
à la fonctionnalité de l’écosystème
forestier - bois mort, arbres habitat -, au respect des sols et
des peuplements, au contrôle des coupes ainsi qu’à
la mise en valeur des arbres intéressants d’un point
de vue paysager.
Cette sylviculture permet donc de donner aux gestionnaires la
capacité de répondre à différents
enjeux.
Comment
peut-on distinguer la SMCC d’une sylviculture régulière
?
Dans
la sylviculture régulière, la parcelle a beaucoup
de poids dans les décisions sylvicoles. Par exemple, si
on choisit d’enlever du taillis pour préparer une
régénération, on va le faire sur l’ensemble
de la parcelle. En revanche, la sylviculture irrégulière
est une sylviculture d’arbre. Chaque situation mérite
un type d’intervention différent : récolter
un gros bois, aider une jeune tige, désigner un arbre habitat,
travailler un peu le taillis…
Du point de vue d’un observateur, on peut aussi distinguer
ces sylvicultures en fonction des conséquences paysagères.
Dans la futaie régulière, la coupe définitive
ou la coupe rase sont instituées en tant que système
de gestion. Dans la futaie irrégulière, il n’y
en a plus besoin, hormis dans le cadre sanitaire.
En
quoi la SMCC peut-elle répondre aux enjeux de transition
?
À
mon sens, la SMCC permet de satisfaire pleinement plusieurs exigences
à une échelle très fine. C’est-à-dire
assurer la stabilité de l’écosystème,
produire du bois de qualité, stocker du carbone, accueillir
du public…, sans sacrifier l’un de ces aspects.
En SMCC, on peut favoriser une grande diversité d’espèces,
d’ambiances, de luminosité…, et orienter petit
à petit les dynamiques naturelles. Cette souplesse est
un avantage majeur. Par exemple, on peut planter quelques chênes
pubescents sans avoir besoin de faire un pari pour les cent prochaines
années à l’échelle d’une parcelle
entière. Plus tard, on peut contrôler les résultats
et réévaluer la stratégie en fonction des
nouvelles connaissances.
Cette souplesse permet de produire du bois en affectant le moins
possible les autres services écosystémiques, et
en maîtrisant les risques et les investissements. C’est
pour cela que la SMCC peut être pertinente, au moins autant
voire plus que les autres méthodes, notamment dans un contexte
de changement climatique.
Propos
recueillis par Antoine Le Manchec,
Chargé de projets à FNE Ile-de-France |
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Gestion
de la forêt essonnienne |
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L’Essonne
présente les mêmes spécificités que
les autres départements de la grande couronne : une zone
fortement urbanisée au nord, et une zone rurale qui se
fait grignoter par l’urbanisation au sud. Pourtant, deux
des plus importants massifs forestiers du département se
trouvent au nord, Sénart et la forêt de Verrières.
Ces deux forêts sont sans doute les plus fréquentées
par le public. Viennent ensuite les forêts départementales
des Grands Avaux, de Roche Turpin, et les forêts communales
comme celle de Gif-sur-Yvette.
Forêt
Sénart
© Archives SEE
Ce
succès auprès des visiteurs ne va pas sans contradictions
: comment répondre à la demande sociale, sans négliger
les autres fonctions que sont la protection de l’environnement
et l’exploitation du bois inhérent à la production
biologique ? Car en effet, peut-on accueillir le public si l’on
ne prend pas soin d’assurer la sécurité, tout
en éclaircissant les paysages. Doit-on compter sur les
recettes financières des forêts des autres régions
pour assurer les infrastructures permettant au public de profiter
de forêts de l’Essonne, ou encore pour réaliser
les travaux nécessaires au maintien de la biodiversité
qui explose dès que l’on ouvre les peuplements, ou
que l’on restaure des zones ouvertes telle que des landes
ou des prairies.
Le
sud du département, outre les forêts domaniales de
Dourdan et une partie de la forêt des Trois Pignons, est
dominé par des forêts privées, principalement
concentrées dans les vallées creusées par
les cours d’eau : Essonne, Juine, Remarde… Elles sont
pour la plupart, comme partout, non gérées, car
appartenant à une multitude de propriétaires possédant
moins de 4 hectares.
Elles ont conquis des sols délaissés car impropres
à l’agriculture, des terrains escarpés sur
lesquels se trouvent de nombreux blocs de grès sur des
sables de Fontainebleau : structure géologique à
dominante sableuse. On y trouve assez souvent d’anciennes
carrières de sable ou de grès. Il est intéressant
de noter alors la présence d’une flore et d’une
faune particulière, typique de ces sols pauvres par endroit,
humides ailleurs, et laissés en libre évolution.
Restauration
d’une lande à callune et bruyère
en exploitant les bouleaux qui l'avaient colonisée
© Luc Baret
Un
tiers de ces forêts privées sont toutefois gérées
dans le but de produire du bois de qualité - bois d’oeuvre,
bois d’industrie - ou du bois de chauffage en autoconsommation,
ou vendu.
Comme
dans toutes les forêts d’Île-de-France, les
essences rencontrées sont principalement le chêne
sessile ou pédonculé, majoritaires en forêt
domaniale, et le châtaignier, prépondérant
en forêt privée. Dans les forêts gérées,
les mélanges d’essences se généralisent
: on y trouve alors du merisier, du robinier, du frêne,
du chêne pubescent, des résineux…, je pourrais
citer toute la flore forestière.
Depuis
dix ans, les forêts domaniales sont gérées
de manière à convertir les futaies régulières
et les taillis-sous-futaie en futaie irrégulière,
dans lesquelles il y aura des arbres de tous âges et de
tous diamètres dans toutes les parcelles. Cette conversion
va au rythme de la forêt, le résultat n’est
pas encore visible pour les non-initiés. De plus, cette
structure nécessite plus de lumière au sol afin
de favoriser la venue de semis qui seront à leur tour les
arbres centenaires pour les générations
futures. D’où des coupes plus importantes dans un
premier temps - une quinzaine d’années -, qui peuvent
choquer le public et certaines associations.
La
forêt a toujours changé de visage, parfois imperceptiblement,
parfois brutalement, mais, en Essonne, elle est toujours là.
Luc
Baret, Soisy-Etiolles Environnement |
©
Etienne Piechaud |
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.....
.......Pour
des forêts vivantes en Île-de-France
..............
................Édité
par FNE Ile-de-France - Association régionale
agréée Environnement - Publié avec
le concours du Conseil Régional d’Île-de-France
................Directeur
de publication : L. Blanchard - Dépôt
légal : Décembre 2023 - Janvier 2024 -.N°
Commission Paritaire : 0124 G 81563 - ISSN 2555-2546
.................
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Le
devenir des forêts franciliennes nous préoccupe
tous.
Nos forêts souffrent du réchauffement climatique.
Les sécheresses à répétition
les fragilisent, les maladies et la surexploitation
les mettent à genoux. En 2022, les forêts
du Grand Est ont émis plus de carbone qu’elles
n’en ont capté ! L’alerte est très
sérieuse. Il fallait faire le point avec l’ensemble
des acteurs et élaborer des propositions. C’est
ce que nous avons fait le 8 juin 2023 lors d’un
colloque à l’Académie du climat.
Nous en avons publié les actes, et rédigé
un projet de manifeste qui occupe le cahier central
de ce numéro de Liaison.
Nous
devons un grand merci à toute l’équipe,
salariés et bénévoles, qui anime
notre fédération FNE Ile-de-France. C’est
grâce à l’investissement de chacune
et de chacun que notre mouvement peut contribuer à
la transition. Nous dédions à tous les
touches de poésie qui émaillent ce numéro.
fne-idf.fr
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Le
magazine des associations
de protection de l'environnement
de l'Île-de-France
Comité
de rédaction :
J. Buisson, M. Colin, C. Giobellina,
M. Holvoet, P. Latka, I. Lledo,
M. Martin-Dupray, J-P. Moulin,
C. Nedelec, I. Nenner, F. Redon,
M. Riottot, H. Smit, D. Védy. |
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