La
formation d’un système d’espaces paysagers
de 51,9 ha, réunissant sites existants et en projet, propose
une réponse à cette problématique, en concevant
un ensemble paysager commun pour ce territoire, qu’il s’agit
de décliner dans ses composantes paysagères, écologiques,
programmatiques et enfin sociales.
Quatre grands objectifs permettent de guider les aménagements
de ce système d’espaces végétalisés.
1.
La valorisation des grandes continuités métropolitaines
Le
secteur comprend trois grandes portes parisiennes destinées
à être transformées en place du Grand Paris.
Les aménagements de ces places doivent être accompagnés
d’une présence végétale renforçant
les continuités paysagères entre les séquences
végétalisées et entre Paris et les communes
riveraines :
• en 2024, la porte de la Chapelle, se transforme. Les nouveaux
programmes métropolitains - Arena de la porte de la Chapelle,
Campus Condorcet, Dock des Alcools - nécessitent le redimensionnement
des espaces publics, de la rue de la Chapelle à l’avenue
du Président Wilson, et une réflexion sur la discontinuité
générée par l’échangeur ;
• d’ici 2030, la porte d’Aubervilliers accueillera
le passage du Tramway T8 reliant Saint-Denis à la place
Rosa Parks, transformant la porte d’Aubervilliers en prolongeant
le mail planté de l’actuelle porte, mais aussi l’ensemble
des espaces libres des Entrepôts des magasins généraux
de Paris. Les espaces plantés de ce futur mail doivent
permettre la création d’une grande continuité
paysagère reliant Chapelle Charbon et la Gare des Mines
au parc des Portes de Paris ;
• la porte de la Villette prévoit la création
de 9 ha d’espaces verts qui devront agrémenter les
grandes continuités du canal Saint-Denis, et le long du
faisceau ferré en direction de la Cité Fertile,
futur éco-quartier de Pantin.
Le canal Saint-Denis, axe olympique, est également un lien
métropolitain dont l’aménagement des berges
doit faciliter les liaisons entre le parc de la Villette et le
Stade de France.
La
topographie de la plaine de France, qui a facilité l’insertion
des infrastructures de transport, s’en est aussi trouvée
modifiée, notamment aux abords du Boulevard périphérique
(BP). Le futur parc devra prendre en compte la complexité
de ce paysage, et en valoriser les différentes continuités
:
• paysagères, d’une part en renforçant
le corridor boisé du BP sur les séquences en talus,
et en valorisant ses sous-faces lorsqu’il est en viaduc,
et d’autre part en valorisant les berges des voies ferrées,
où se développent de nouvelles continuités
paysagères : promenade ferroviaire du faisceau est, continuité
entre la porte de la Villette et le futur éco-quartier
de Pantin, parc reliant la Gare des Mines aux cathédrales
du rail sur Plaine Commune, continuité entre le parc Chapelle
Charbon et la partie ouest du XVIIIe arrondissement, avec la création
d’une passerelle au-dessus du faisceau ferroviaire nord
reliant le square Raymond Queneau à la rue Championnet
;
• visuelles, puisque le territoire de Paris Nord-Est (PNE)
est ponctué de vues sur les grands repères métropolitains
- tour Pleyel, TGI, basilique du Sacré-Coeur, Orgues de
Flandres, tours Michelet et de la Villette - qu’il s’agira
de rendre plus perceptibles encore, à l’image des
points de vue offerts par les toitures-terrasses accessibles de
la Philharmonie et de l’Arena.
2.
Le renforcement de la biodiversité
À
ce stade, l’Agence de l’écologie urbaine identifie
déjà le renforcement nécessaire de certaines
continuités identifiées dans l’Atlas de la
biodiversité :
• le tronçon de la Petite Ceinture (PC) sous les
immeubles récents, entre la porte de la Chapelle et le
faisceau ferré de la gare du Nord, par la végétalisation
en plusieurs strates du trottoir attenant, et de part et d’autre
des voies ferrées ;
• la connexion entre la pointe nord-ouest du parc Chapelle
Charbon et la porte de la Chapelle, la voie ferrée du Charles
de Gaulle Express introduisant une fragmentation des espaces ;
• l’intersection de la rue de Crimée avec la
rue d’Aubervilliers, à l’angle des projets
Hébert et Îlot Fertile, dont la végétalisation
dense et multistrates doit permettre à la faune de se déplacer
dans toutes les directions : vers le jardin d’Éole,
vers la rue Riquet le long du jardin des Mécanos, vers
le parvis de Rosa Parks, et vers la Porte d’Aubervilliers
;
• la connexion de part et d’autre du Boulevard périphérique
par la végétalisation de la passerelle Claude Bernard,
à l’image de la passerelle du Cambodge entre la Cité
Universitaire et Gentilly ;
• la plantation massive le long du tramway T8, notamment
d’arbustes très diversifiés pour la partie
sur dalle, pour connecter le square Charles Hermite à la
place Skanderberg ;
• le renforcement des berges des canaux de part et d’autre
du BP, et jusqu’au parc de la Villette, par des aménagements
aquatiques - boudins à hélophytes -, différentes
strates végétales sur une épaisseur variable
mais continue le long des berges.
La
trame bleue est à renforcer, notamment par la création
de mares végétalisées de grandes tailles,
dans les nouveaux aménagements et partout où cela
sera possible.
Concernant
les espèces animales observées localement, on recense
:
• des passereaux diversifiés qui justifient l’installation
de nichoirs à proximité des espaces ouverts et des
arbustes régionaux ;
• des chiroptères qui nécessitent une rationalisation
maximale de l’éclairage urbain ;
• des lézards de murailles qui auraient besoin de
murets de pierres / tas de pierres sur des secteurs ensoleillés.
Les
espèces exotiques envahissantes floristiques sont assez
répandues sur la PC : renouée du Japon et buddleia
à l’ouest des voies de la gare du Nord et du côté
Rosa Parks.
D’une
façon générale, l’identification de
secteurs en défens ou à mettre en défens
car un peu loin des usages, pour y créer des espaces de
biodiversité – secteur refuges constitués
d’habitats prioritaires - tas de bois mort, lierre grimpant,
roncier, prairie en fauche annuelle, vieux arbres, arbres à
fruits charnus, arbustes régionaux, mares, murets à
interstices… - est à prévoir pour permettre
l’accueil des espèces dans ce futur parc. La plantation
massive de végétaux très diversifiés
- en genres, espèces, individus issus de semis, strates
- est indispensable pour diminuer de façon suffisante l’îlot
de chaleur urbain du secteur et renforcer l’accueil des
espèces animales et végétales.
3.
La création de parcours sportifs et de rues programmées
La
création d’une boucle active et sportive de 11 km
permettrait de relier les parcs et équipements sportifs
de ce territoire de la ceinture verte.
En partant de la porte de la Chapelle sur l’axe requalifié,
ce parcours sportif rejoint la halle Pajol et le jardin d’Éole.
Il emprunte alors la promenade du faisceau ferroviaire à
l’étude, pour rejoindre le futur jardin Hébert,
puis celui de Chapelle Charbon. Du parc de Chapelle Charbon étendu
sous le pont d’Aubervilliers, une continuité piétonne
est possible jusqu’au canal Saint-Denis, et de là
au parc de la Villette. Il emprunte alors la forêt linéaire
et son prolongement, dans la ZAC de la Gare des Mines, pour rejoindre
l’Arena de la porte de la Chapelle.
Outre l’Arena et le campus Condorcet, nouveaux équipements
métropolitains du quartier, cette boucle relierait trois
centres sportifs - Ladoumègue, Gare des Mines, Claude Bernard
- et une dizaine de parcs, jardins et squares existants et en
projet. Elle s’ouvrirait aussi sur la métropole,
grâce aux parcours sportifs du canal de l’Ourcq et
du canal Saint-Denis, ainsi que celui de l’axe olympique
de la Chapelle.
En reprenant les principes des parcours sportifs, l’identité
de ces espaces publics pourrait s’appuyer sur :
• une signalétique propre ;
• un ensemble de services et de mobilier cohérent
;
• un traitement de sol sobre et dénué d’obstacles,
accompagné de carrefours apaisés ;
• une offre sportive et de loisirs qualitative et cohérente
: agrès, aménagements, peinture au sol ;
• des sites ponctuels dédiés à des
pratiques spécifiques : danse, street ball, escalade…
;
• l’aménagement de parcours sportifs et de
parcours de fraîcheur ;
• une continuité végétale multistrate,
arborée, arbustive et herbacée ;
• une offre culturelle : interventions artistiques et embellissement
des sous-faces des infrastructures notamment ;
• un éclairage adapté aux fonctions écologiques,
d’accessibilité à tous, de convivialité
et de pratiques sportives ;
• une présence régulière de lieux de
rassemblement.
4.
La facilitation des liens sociaux
Le
sentiment d’insécurité, lié notamment
à la très grande précarité, explique
en partie des conflits sur l’espace public. On relève
aussi un manque de connaissance des habitants quant aux équipements
nouveaux proposés.
La
mise en système des espaces végétalisés
de PNE offrirait la possibilité de faciliter l’appropriation
des espaces publics existants et en projet. Il conviendrait pour
cela de mettre en place les outils de co-construction du projet
avec les habitants et les acteurs sociaux présents. Trois
peuvent déjà être identifiés :
• une enquête anthropologique sur les usages de l’espace
public ; cette étude permettrait de comprendre les usages
de l’espace public de PNE de jour comme de nuit, selon les
différents publics, et de recueillir les attentes des habitants
du secteur ;
• l’instauration d’ateliers de co-construction
du projet avec les habitants : à l’image du parc
de Chapelle Charbon, et des travaux menés sur l’espace
public avec les habitants de la cité Charles Hermite, ou
encore de l’exposition photographique sur le chantier de
l’Arena, des expérimentations sur l’espace
public et des travaux participatifs d’embellissement sont
à mettre en œuvre afin de faciliter l’appropriation
du secteur par ceux qui l’habitent ;
• un processus de concertation et d’animation durant
toutes les étapes du projet pour informer les habitants
et ajuster les projets et les sites en fonction des situations
et des attentes. |
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1.
Le parc de la forêt linéaire au nord du BP
a été aménagé en 2014.
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2.
L’espace public à l’extrémité ouest
de la promenade Evora a été aménagé
suite
à l’insertion du tramway T3 en 2012.
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Le système paysager de Paris Nord-Est pourrait s’étendre
sur près de 52 hectares, liant aux quartiers existants
de la ceinture verte une douzaine d’opérations d’aménagement
engagées ou en projet. Au centre de ce système paysager,
un parc d’un seul tenant de plus de 27 hectares permet de
relier la porte de la Chapelle à la porte de la Villette
à travers des espaces de différentes natures. Le
système de Paris Nord-Est assemblerait ainsi 4 typologies
spatiales :
1.
Les parcs, jardins et squares
Bien
que certains soient ouverts en continu, comme le jardin Evora,
les parcs, jardins et squares impliquent majoritairement des horaires
d’ouverture et une gestion de leurs accès. On en
recense 11 existants sur ce secteur de PNE, auxquels s’ajoutent
13 autres en projet et à l’étude, dont 5 déjà
engagés.
2. Les espaces publics végétalisés
Les
espaces publics végétalisés comprennent tous
les espaces publics piétons suffisamment végétalisés
pour s’apparenter à une rue-jardin. Sur PNE, on compte
ainsi le mail d’Aubervilliers, qui se présente comme
une succession de squares qui seront prolongés par l’arrivée
du tramway T8, la forêt linéaire, elle aussi destinée
à se prolonger le long de la Gare des Mines, ou encore
la future promenade du faisceau ferroviaire est. La promenade
Evora à l’est du même square, le passage piéton
au cœur de l’Îlot Fertile, les berges du canal
Saint-Denis, la future rue des sports de la Gare des Mines ou
encore les voies entièrement piétonnisées
sont ici intégrés.
3.
Les espaces végétalisés non accessibles
Disposés
sur le domaine public ou intégrés dans les grandes
parcelles de la SNCF, ces espaces publics ne sont pas destinés
à accueillir du public, de par leur topographie et leur
proximité aux infrastructures, ou de par la question de
la maîtrise foncière. Il s’agit néanmoins
d’espaces fortement végétalisés, de
pleine terre, et qui jouent ou peuvent jouer un rôle important
de continuité écologique. On compte ici les talus
du Boulevard périphérique et son terreplein central,
potentiellement certaines bretelles susceptibles d’être
désactivées, et les emprises SNCF contiguës
au parc Chapelle Charbon.
4.
Les cœurs d’îlot
Il s’agit, dans le tissu parcellaire, des emprises faiblement
végétalisées, et dont le renforcement de
la part végétalisée pourrait être bénéfique
au rafraîchissement urbain. Il s’agit d’une
part des centres sportifs, et d’autre part des cœurs
d’îlots susceptibles d’être ouverts à
la population : cour d’école, jardin des universités…
À
titre d’exemple, la requalification récente de la
cité Michelet au sein de PNE témoigne de l’intérêt
d’une ouverture des grandes emprises parcellaires et de
leur végétalisation.
La
réussite du système des espaces paysagers de Paris
Nord-Est passera par l’articulation entre ces typologies,
qui suppose un parc urbain ouvert sur la ville, traversé
par des rues, sans pour autant perdre ses continuités paysagères
et de cheminement. |
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