Les départements ont un rôle clé à jouer pour
le développement du vélo en Île-de-France. Ils gèrent
des centaines de kilomètres de
routes départementales, qui sont le support privilégié
pour un réseau de pistes cyclables. Aujourd’hui, les sept
départements d’Île-de-France,
en dehors de Paris, ont tous leur plan vélo. Le sujet est incontournable,
et les sept se positionnent avec une ambition qui se mesure en millions
d’euros et en dizaines, voire centaines, de kilomètres d’aménagements
cyclables à réaliser. Mais où en sont-ils aujourd’hui
? Pour la première fois depuis les élections de 2021, le
Collectif Vélo Île-de-France évalue l’avancement
du linéaire d’aménagements cyclables réalisé
par
les départements franciliens, hors Paris.
Quel
bilan à mi-mandat ? |
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Premier
constat, une majorité de collectivités ont pris
du retard par rapport à leurs promesses initiales. À
quatre ans de la fin du mandat, seuls les départements
des Hauts-de-Seine et de la Seine-Saint-Denis ont réalisé
plus du tiers de leurs engagements depuis 2021. Alors que la Seine-Saint-Denis
est le département le plus pauvre de France métropolitaine,
elle a su déployer un vaste réseau de coronapistes
lors de la période Covid, et profiter de l’opportunité
des Jeux Olympiques et Paralympiques de 2024 pour accélérer
la réalisation de son plan vélo. Avec les Hauts-de-Seine,
c’est le département qui a réalisé
le plus grand nombre de kilomètres d’aménagements
cyclables depuis 2021, respectivement 41 km pour la Seine-Saint-Denis
et 37 km pour les Hauts-de-Seine.
Deuxième
constat, on note une forte disparité entre les départements
de petite et de grande couronne. En petite couronne, le Val-de-Marne,
la Seine-Saint-Denis et les Hauts-de-Seine mettent davantage de
moyens financiers et humains pour atteindre leurs objectifs, par
ailleurs bien plus élevés. Un département
comme l’Essonne a réalisé moins de 10 km d’aménagements
cyclables depuis 2021, quand les Yvelines se concentrent encore
trop sur des aménagements destinés au vélotourisme,
et viennent d’annoncer un moratoire sur les financements
vélo pour raisons budgétaires.
Troisième
constat, et celui-là est peut-être le plus réjouissant
: dans leur majorité, les départements semblent
avoir haussé leur niveau d’exigence pour la qualité
des aménagements cyclables. Nous avons sélectionné
pour chaque département le plus bel aménagement
du territoire. Ces exemples montrent que quand les départements
veulent, ils peuvent faire des infrastructures de qualité
qui répondent aux besoins des cyclistes.
Alors
que l’on arrive à la moitié des mandats départementaux,
il est encore temps d’agir pour le vélo et d’accélérer
les réalisations d’aménagements cyclables.
Dans un contexte de contraintes budgétaires pour les départements,
le vélo ne doit pas servir de variable d’ajustement
budgétaire, au contraire ! Alors que l’entretien
et la construction de nouvelles routes coûtent chers, le
développement du vélo est une politique peu coûteuse,
avec des résultats positifs à très court
terme. Par leur action en faveur du vélo, les départements
peuvent améliorer considérablement et durablement
la mobilité de millions de Francilien·nes.
La
petite couronne : 92 93 94
Parmi
les trois départements de petite couronne, deux se distinguent.
La Seine-Saint-Denis, tout d’abord, pour sa capacité
à saisir les opportunités afin d'accélérer
le déploiement de sa politique cyclable. Que ce soit lors
du Covid ou à l’occasion des Jeux de Paris 2024,
le département a systématiquement trouvé
le moyen de financer et réaliser des dizaines de kilomètres
de pistes cyclables, parfois en transitoire quand un aménagement
lourd n’était pas possible. Le département
des Hauts-de-Seine se distingue, lui, pour son niveau d’ambition
très élevé et la qualité des aménagements
cyclables qui sortent progressivement de terre. Pas moins de 80
km d’infrastructures sont à l’étude,
des aménagements attendus avec impatience par les associations.
Quant au Val-de-Marne, s’il a résorbé la coupure
cyclable majeure du carrefour Pompadour et s’apprête
à transformer radicalement des axes incontournables pour
le vélo à Vincennes et Charenton, il avance aujourd’hui
moins vite que les départements voisins. Depuis 2021, il
a réalisé trois fois moins d'aménagements
que la Seine-Saint-Denis. Il doit aujourd’hui accélérer
la mise en œuvre de son plan vélo adopté en
2023.
La
grande couronne : 77 78 91 95
Les
quatre départements de grande couronne sont en retard sur
leurs ambitions. Le Val-d'Oise se distingue avec près de
20 km aménagés, mais à un rythme encore trop
faible pour répondre aux objectifs de son plan vélo,
ou pour talonner les voisins de petite couronne. La Seine-et-Marne
et les Yvelines ont réalisé respectivement 12,6
km et 11,1 km, tandis que l’Essonne est derrière
avec 9,3 km.
Derrière ces chiffres se cachent d’autres disparités.
Le Val-d'Oise semble au point mort sur les aménagements
phares fortement attendus en zone dense, et n’a pas encore
mis en place de cadre de concertation systématique avec
les associations. La Seine-et-Marne n’a toujours pas constitué
d’équipe vélo, et n’a pas accéléré
le rythme des réalisations depuis la révision de
son plan vélo. Les Yvelines viennent de réduire
drastiquement le budget dédié au vélo et
les subventions alloués aux communes, nous faisant craindre
un arrêt total des réalisations pour le vélo
au cours des prochains mois. En Essonne, le département
semble s’engager dans une bonne dynamique de concertation
avec les associations mais peine à livrer des aménagements
attendus depuis des années.
Il reste trois ans à ces départements pour agir.
Des résultats sont possibles, tant la mise en oeuvre d'aménagements
cyclables est rapide en comparaison à des gros projets
routiers ou de transports en commun. Il faudra pour cela faire
du vélo une priorité. |
©
pikisuperstar / Freepik
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Aménagements cyclables réalisés depuis
2021
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Méthodologie
La
politique vélo des départements englobe un vaste
panel de sujets allant de l’implantation de stationnement
vélo, à la réalisation de campagnes de communication
en passant par le développement du cyclotourisme. Dans
notre bilan, nous nous concentrons uniquement sur la réalisation
des aménagements cyclables, car cela constitue le cœur
de l’action départementale en faveur du vélo.
Cela comprend les pistes cyclables, les voies vertes et les bandes
cyclables. Les zones de rencontre et les zones 30 ne sont pas
prises en compte dans le linéaire réalisé
par les départements, car ces aménagements ne sont
pas considérés comme des aménagements cyclables
par le Cerema. Par ailleurs, nous précisons la longueur
du linéaire réalisé en bandes cyclables,
puisque ce sont des aménagements qui offrent un moindre
degré de sécurité pour les cyclistes. Pour
obtenir les chiffres des réalisations, nous avons croisé
les informations remontées par nos associations et les
bases de données fournies par les départements.
À noter que le Collectif Vélo Île-de-France
est partenaire des départements des Haut-de-Seine, de la
Seine-Saint-Denis et du Val-de-Marne. |
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Les
Hauts-de-Seine
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Aménagement
exemplaire : D106 à Colombes ©
Collectif Vélo IDF
La
D106, à Colombes, qui permet de rejoindre le parc Pierre-Lagravère,
la Seine et le stade Yves-du-Manoir, illustre la qualité
des nouveaux projets vélo des Hauts-de-Seine.
•
Bordure chanfreinée
•
Couleur du
revêtement •
Courbes douces
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Le
département fait preuve d’un niveau d’ambition
très élevé pour le développement du
vélo. Il s’engage dans des projets d’envergure,
dont les standards de qualité ont été nettement
revus à la hausse. Il a réalisé 37 km d’aménagements
cyclables depuis 2021, ce qui fait de lui le deuxième département
francilien qui fait le plus pour le vélo. Et la suite est
prometteuse, avec pas moins de 84 km de projets d’aménagements
à l’étude. Mais ces études vont mettre
du temps à se concrétiser en pistes cyclables sur
le terrain. Les associations appellent donc le département
à lancer davantage de projets transitoires, plus légers
et plus rapides à mettre en oeuvre. Elles demandent également
à ce que les ponts sur la Seine, qui constituent des coupures
majeures, soient traités en priorité.
Des
réalisations chronophages mais qualitatives
Les
Hauts-de-Seine ont pris le virage du vélo. Au moment de
la crise sanitaire, le département a été
réactif en créant plus de 40 km de coronapistes,
équipant des axes qui semblaient impossibles à aménager
jusqu’ici. Ces nouveaux aménagements ont favorisé
l’accélération de la pratique du vélo
dans les Hauts-de-Seine. La mise en place d’un plan vélo
ambitieux voté en 2022, doté d’un budget de
150 millions d'euros, confirme cette dynamique. 37 km d’aménagements
cyclables sur les 120 km prévus d’ici à 2028
ont été livrés depuis 2021, soit le deuxième
meilleur bilan francilien après la Seine-Saint-Denis. Aujourd’hui,
31 % de leur plan vélo est complété et le
reste des aménagements prévus - 80 km - est à
l’étude. Si le département déroule
son programme tel qu’il est prévu, il sera dans les
temps du programme qu’il s’est fixé, et c’est
assez rare pour le souligner. Cela préfigure une transformation
d’ampleur du territoire. La majorité des projets
réalisés depuis 2021 sont des semi-pérennisations
de coronapistes sous forme de bandes cyclables, ou des aménagements
en parallèle du tram T10. Ces bandes, de la simple peinture,
ne sont pas sécurisantes. Des plots en plastique ou des
séparateurs en béton pourraient être posés
pour améliorer la sécurité des cyclistes,
notamment le long du T10 au Plessis-Robinson et Châtenay-Malabry,
et de la D21 à Puteaux. Le département est déjà
en train de travailler sur le sujet : récemment la D1 à
Boulogne-Billancourt a été équipée
! Un tiers des réalisations livrées depuis 2021
s’inscrivent dans des projets de reconfiguration totale
de la voirie, permettant des aménagements cyclables ambitieux
et qualitatifs. Les projets à l’étude sont
également prometteurs, mais ils sont encore loin d’être
concrétisés. Le département peut aménager
provisoirement ces axes, afin de permettre aux cyclistes de se
déplacer sur des itinéraires sécurisés.
Créer
des aménagements transitoires pour accélérer
les réalisations
Alors
que les cyclistes sont de plus en plus nombreux·ses dans
les Hauts-de- Seine, les associations constatent qu’encore
de nombreuses routes départementales
n’offrent pas un niveau suffisant de sécurité
et de confort pour se déplacer à vélo. Il
s’agit de routes sans aucun aménagement vélo
- par exemple la D39 entre Rueil et Suresnes, ou la D3 à
Suresnes -, d’axes équipés de coronapistes
qui se dégradent fortement - par exemple les D986 et D13
à Colombes -, ou des routes sur lesquels les protections
ont été retirées ou ont disparu : par exemple
les D1 et D907 à Boulogne et la D9A à Puteaux. Pour
apporter une solution sans attendre la livraison d’aménagements
cyclables dans quatre ans, voire plus, les associations appellent
le département à réaliser des aménagements
cyclables transitoires de qualité. Le département
va d'ailleurs réaliser un projet semilourd - hybride
entre coronapiste et requalification complète - sur la
RD920. C'est une première dans les Hauts-de-Seine, et devra
servir d'exemple pour de futurs projets de grande ampleur. La
sécurisation des cyclistes avant et pendant la phase travaux
doit devenir un réflexe systématique. Un aménagement
cyclable temporaire pourrait aussi être réalisé
sur la D913 entre Rueil-Malmaison et la place de la Boule.
Faire
de la sécurisation des ponts une priorité
Les
ponts des Hauts-de-Seine ne représentent que quelques centaines
de mètres, mais ce sont pour beaucoup aujourd’hui
des points noirs pour la pratique du vélo. Sur les 14 ponts
stratégiques des Hauts-de-Seine, seuls trois - ponts de
Courbevoie, d’Issy-les-Moulineaux et de Neuilly - sont réellement
aménagés pour le vélo. Un autre, le pont
de Saint-Cloud, vient d’être aménagé.
Réalisé en avance de phase d’un projet plus
global, cet aménagement n’est pas parfait, notamment
en ce qui concerne son raccordement, mais c’est un pas dans
la bonne direction ! Le Collectif salue cette avancée,
et demande que le département envisage des actions semblables
sur les sept autres ponts où les aménagements ont
été créés sur trottoir, réduisant
l’espace piéton et augmentant les conflits d’usage.
Enfin, trois ponts ne possèdent, à date, aucun aménagement.
Les solutions prévues - une passerelle et des pistes cyclables
- vont mettre des années à être réalisées,
laissant les cyclistes en danger d’ici là.
Les associations appellent le département à faire
des ponts une priorité d’action de son plan vélo.
Cela implique d’étudier la réduction du nombre
de files dédiées aux véhicules motorisés
pour installer des pistes cyclables, comme cela a été
fait avec succès sur les ponts de Neuilly et de Courbevoie.
Les ponts de Puteaux et de Gennevilliers pourraient suivre leur
exemple. Les ponts de Suresnes et de Clichy présentent
un trafic voiture plus important, mais le nombre élevé
de vélos qui passent tous les jours justifie également
la mise en place rapide d’un aménagement vélo,
plus étroit s’il le faut, mais séparé
du trottoir et de la chaussée.
Amplifier
la dynamique de concertation
Le
Collectif Vélo Île-de-France salue la dynamique de
concertation aujourd’hui bien ancrée dans les Hauts-de-Seine.
Le département consulte le Collectif et les associations
sur de nombreux projets et se montre à l’écoute
des besoins des cyclistes. À l’instar du Comité
des modes actifs instauré par le département de
la Seine-Saint-Denis, les Hauts-de-Seine gagneraient désormais
à confirmer cette dynamique de coopération, en constituant
un comité vélo à l’échelle départementale
et territoriale réunissant élu·es, technicien·nes
et associations. Ces temps de rencontre seraient l’occasion
d’évoquer les projets en cours et à venir,
d’ajuster les ambitions et priorités des différentes
collectivités, et de permettre aux associations de partager
leur retour d’usage.
Itinéraires
prévus |
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Nos
demandes
- Réaliser
des aménagements cyclables transitoires qualitatifs là
où les coronapistes se dégradent, et en attendant
des projets à échéance lointaine.
- Faire
de l’aménagement des ponts une priorité,
en commençant par les ponts de Puteaux, de Clichy et
de Gennevilliers.
- Mettre
en place un comité vélo réunissant les
collectivités du département et les usager·ères.
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.....
.Qu’ont
fait les départements franciliens pour le vélo
depuis 2021 ?
Le
bilan à mi-mandat
..............
Pour
la première fois, le Collectif Vélo
Île-de-France a calculé le nombre de
kilomètres d’aménagements cyclables
réalisés par les départements
depuis le début de leur mandat en 2021. Les
départements ont un rôle clé à
jouer pour le développement du vélo
en Île-de- France. Ils gèrent des centaines
de kilomètres de routes départementales,
qui sont le support privilégié pour
un réseau de pistes cyclables. Aujourd’hui,
les sept départements d’Île-de-France
- en dehors de Paris - ont leur plan vélo.
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...
. |
|
....
3 constats ressortent
de ce bilan :
•
Une
majorité de collectivités ont pris du retard
dans la réalisation de leur plan vélo.
•
Il
y a une grande disparité entre les départements
de petite et de grande couronne.
•
Mais
le niveau d’exigence pour la qualité des
aménagements cyclables est en hausse.
Bilan
réalisé par le Collectif Vélo Île-de-France,
association loi 1901
•
Comité
de rédaction et coordination : Agathe Dulongcourty,
Marie Wehner, Juliette Bucco, Louis Belenfant, Jeanne
Bruge
•
Typographies
: Basic Sans •
Conception graphique : Louise
Robert •
Première diffusion numérique : octobre
2024
velo-iledefrance.fr |
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