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Étude Les anciennes carrières souterraines en Île-de-France
Entre risques et opportunités d’aménagement

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(1) Introduction
L’Écoparc des carrières René Dumont. Fontenay-sous-Bois (94)
L’Île de Loisirs de la Corniche des Forts. Romainville, Pantin, Les Lilas, Noisy-le-Sec (93)

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La présence de zones d’anciennes carrières souterraines est liée à la richesse en matériaux de construction du sous-sol francilien. C’est l’une des raisons historiques de son développement. Dès l’époque gallo-romaine, le calcaire grossier, employé comme pierre à bâtir, le gypse, utilisé dans la fabrication du plâtre, et la craie, utilisée dans la fabrication de la chaux et du ciment, furent exploités à ciel ouvert, puis surtout en souterrain. Cette intense exploitation, qui dura plusieurs siècles, nous a légué des vides très importants. Plus de la moitié des communes de Paris et de la petite couronne est concernée par des zones sous-minées - 2 613 hectares -, sur des surfaces très variables, de quelques
centaines de mètres carrés à plusieurs dizaines d’hectares, comme dans le Sud parisien : anciennes exploitations de
calcaire. Plus de 1 400 hectares sont également recensés dans les départements de la grande couronne.

Introduction  

Dès la fin de leur exploitation, ces anciennes carrières sont le siège d’une évolution lente, mais inéluctable, entraînant des mouvements de terrain qui peuvent donner lieu à des affaissements et à des effondrements localisés - fontis - ou généralisés. Ces désordres en surface présentent des risques, assimilés à des risques naturels, pour les constructions et parfois les populations.

Ancienne exploitation souterraine de gypse par pilier tourné,
utilisée en champignonnière. Massif de l’Hautil (78-95) © Nicolas Dudot

La politique de gestion et de prévention des risques naturels vise à mieux les prendre en compte afin de garantir la sécurité des populations et les dommages localisés. La prise en compte du risque dans l’aménagement constitue l’un des principaux axes de la politique française de prévention. Les Plans de Prévention des Risques naturels prévisibles (PPR), institué par la loi Barnier du 2 février 1995, ont vocation à maitriser l’urbanisation sur ces zones à risques par des mesures de prévention, de protection et de sauvegarde, afin d'éviter une aggravation de l'exposition des personnes et les biens, et réduire leurs conséquences négatives, en limitant notamment la constructibilité. Cependant, peu de communes sont à ce jour couvertes par un PPR mouvement de terrain établi au sens de la loi Barnier sur le territoire francilien. La très grande majorité des zones sous-minées sont cependant couvertes par des zonages de risques pris au titre de l’article R111-3 du Code de l’urbanisme qui valent PPR.

La prise en compte de ces risques dans les réflexions d’aménagement suppose la connaissance préalable des aléas. Si les anciennes carrières sont bien localisées à Paris et en première couronne, elles ne le sont encore que partiellement en grande couronne où certaines ont disparu de la mémoire collective ; en Seine-et-Marne, en l’absence d’un service d’études spécialisé, la connaissance de l’aléa est beaucoup moins précise, alors que ce département concentre près d’un tiers des communes potentiellement concernées, et qu’il connaît parallèlement l’un des plus forts taux d’urbanisation d’Île-de-France.

L’aménagement des zones sous-minées porte principalement deux types d’enjeux en Île-de-France, parfois contradictoires :

  • La question de l’urbanisation de ces espaces, au regard notamment des nombreuses contraintes qui pèsent sur ces zones, mais aussi des opportunités que peuvent offrir ces terrains pour la création d’espaces verts et de loisirs, dans le contexte de densification et de carence de certains territoires, en particulier de l’Est parisien. Plus généralement, la place de ces espaces peut être interrogée dans les politiques et stratégies de renaturation, de trames vertes, … des zones densément urbanisées de l’agglomération parisienne.
  • La préservation et la valorisation de ces espaces souterrains qui peuvent revêtir de nombreux intérêts : patrimonial industriel ou architectural, scientifique, géologique, de biodiversité…, mais ces espaces souffrent aujourd’hui d’une faible reconnaissance par les institutions publiques ou scientifiques, ce qui favorise leur disparition progressive dans le cadre des travaux de sécurisation.


Exploitation souterraine de calcaires grossiers par piliers à bras, hagues et bourrages.
Carrière souterraine dite cave-carrière Delacroix, Ivry-sur-Seine (94)
© Stéphane Asseline, Région Île-de-France

 

L’Écoparc des carrières René Dumont. Fontenay-sous-Bois (94)

 


Écoparc René Dumont © Corinne Legenne / L’Institut Paris Region

Le site de l’Écoparc René Dumont s’inscrit sur une ancienne exploitation de gypse datant du XVIIIème siècle, située dans un environnement très urbanisé. A l’origine à ciel ouvert, les procédés d’exploitation évoluent à partir du XIXème siècle. Le gypse est alors extrait en souterrain, selon la technique des galeries et piliers tournés, avant d’être acheminé dans l’usine adjacente pour être transformé en plâtre. L’exploitation prend fin au début du XXème siècle, en raison de l’impossibilité d’étendre la carrière sans mettre en péril les habitations alentours. Le site est alors plus ou moins laissé à l’abandon, servant tour à tour d’entreposage pour les terres excavées de la prolongation de la ligne 1 du métro parisien en direction de Château de Vincennes (1934), puis de décharge publique. Le site reste ainsi inexploité pendant presque cinquante ans en raison des risques importants de fontis. Malgré quelques projets, comme la construction d’un terrain de sport en 1943, le site devient une friche où la nature reprend ses droits.

L’ambition d’une coulée verte reliant les différents parcs de la ville à l’ancienne carrière nait en 1975. En 1984, la commune acquiert une partie du site, qui sera classé en espace vert au POS en 1986. Les techniques de sécurisation pour une ouverture au public, trop onéreuses, ont pendant longtemps ralenti le projet. Plusieurs projets se succèdent menant à celui de l’écoparc actuel, qui ouvre en 2013, après 18 mois de travaux.
Après arasement complet du terrain sur une épaisseur de 1,50 m, qui a nécessité la destruction du couvert végétal, le sous-sol a été partiellement comblé par injection - 20 000 m³ de coulis - pour sécuriser la zone ouverte au public, et servir de point d’ancrage aux géogrilles. Le comblement total n’a pas été réalisé, en raison notamment du coût. La technique de géogrilles utilisée est la même que celle du parc des Lilas à Vitry-sur-Seine. Ce dispositif n’empêche pas la formation de fontis, mais assure la sécurité en cas d’effondrement. Le coût de la sécurisation représente les deux tiers du montant total de l’aménagement.
La mise en sécurité du site est à l’origine du choix des aménagements. Dans le parc, certains espaces pentus et boisés, non totalement sécurisés, ont été clôturés afin de limiter l’accès au public. La biodiversité peut ainsi s’y développer. Le patrimoine historique et le passé d’exploitation du gypse sont rappelés par la présence de plusieurs éléments disséminés dans le parc : porte d’entrée en pierre de taille représentant le gabarit d’une galerie de carrière, mobiliers rappelant les outils utilisés par les carriers… Le parc offre également un point de vue sur le bois de Vincennes, et le sud-est de l’agglomération centrale.

Le projet s’inscrit comme l’un des maillons de la coulée verte sur la commune, qui va du Parc des Beaumonts à Montreuil - également aménagé sur d’anciennes carrières - vers le parc de l’Hôtel-de-Ville et le talus des Grands-Chemins. Il s’inscrit également dans le projet de Parc des Hauteurs.

Un projet d’extension du parc, porté par la ville, est en réflexion au sud du site. Il s’agit d’un projet de renaturation sur 2,5 hectares. Les acquisitions foncières sont portées par la SPL Marne au Bois. La commune ambitionne une ouverture pour fin 2025.

Sources :

L’Île de Loisirs de la Corniche des Forts. Romainville, Pantin, Les Lilas, Noisy-le-Sec (93)  

Le bois de la Corniche des Forts s’étend sur une vingtaine d’hectares, sur le plateau de Romainville, en Seine-Saint-Denis.
Le gypse y a été exploité dans des carrières à ciel ouvert et en souterrain jusque dans les années 1960, principalement par la méthode des piliers tournés. En fin d’exploitation, les carrières ont souvent été abandonnées sans remblayage, ou ont subi un foudroyage afin de provoquer l’effondrement et la disparition des vides. Cependant, foudroyées ou non, ces anciennes carrières constituent un risque pour la stabilité des sols. Les vides présents sur le secteur peuvent aussi être d’origine naturel : dissolution du gypse. La fragilité des sols et la fermeture au public du site ont favorisé la reconquête par la végétation et une grande biodiversité.

Île de Loisirs de la Corniche des Forts
sur les anciennes carrières de Romainville © Eric Garault/ L'Institut Paris Region

Dans les années 1990, émerge l’ambition d’un projet pour ce site, situé dans un contexte très urbanisé et de pression foncière. En 1993, le projet régional de base de loisirs de la Corniche des forts est adopté autour de cette réserve foncière inconstructible. La friche, appartenant à un exploitant, a été rachetée en partie par la commune, et le reste par une société privée. Un projet immobilier portée par la société fut avorté en raison du coût de financement de travaux de mise en sécurité exigés par l’IGC Paris. Classé à l’époque en zone non constructible dans le POS, ce secteur constituait déjà une réserve foncière que la ville souhaitait acquérir en totalité.

En 2000, le Conseil Régional crée l’Île de Loisirs de la Corniche des Forts, ex-projet de base de loisirs. Ce projet de liaison verte, qui s’inscrit dans le projet de Parc des Hauteurs, s’étend sur 64 hectares entre les communes de Romainville, Les Lilas, Pantin et Noisy-le-Sec, avec la particularité de nécessiter de lourds travaux de sécurisation et comblement, puisque situé sur d’anciennes zones de carrières de gypse. Sur ces 64 hectares, la moitié est fermée au public en raison de la présence de zones sous-minées. De premiers travaux de sécurisation débutent entre 2007 et 2016 - injections de coulis, comblement, pose de géogrilles - avec l’ambition d’ouvrir 12 hectares. En 2017, la Région décide de réduire l’ambition de ces travaux d’aménagement à 8 hectares, dont 4,5 hectares seront accessibles au public. En 2021, la Corniche des Forts ouvre sa promenade écologique. Il s’agit d’un aménagement de promenade avec des zones d’observation de la faune et de la flore - passerelle immersive -, des espaces inaccessibles au public, afin de préserver la biodiversité et limiter l’expansion d’espèces dites invasives, une aire de jeux pour les enfants, des prairies et des équipements sportifs.

Estimé à près de 15 millions d’euros, les travaux se sont divisés en trois phases : défrichement, comblement et aménagement. Une forte opposition locale au projet s’est manifestée, avec des arguments de non-préservation de la biodiversité et de destruction des sols. Le projet de la Corniche des Forts s’inscrit dans le projet de Parc des Hauteurs.

Sources :

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Étude Les anciennes carrières souterraines en Île-de-France
Entre risques et opportunités d’aménagement
- Septembre 2024

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Cette étude a été réalisée à la demande du Conseil régional d’Île-de-France dans le cadre de la délibération CP 2022-198 du 20 mai 2022 :
dispositifs reconquérir les friches franciliennes, réhabiliter plutôt que construire, 100 quartiers innovants et écologiques, soutien à l'urbanisme transitoire
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L’Institut Paris Region
15, rue Falguière Paris (XVe)

Directeur général : Nicolas Bauquet
Directeur général adjoint, coordination des études : Sébastien Alavoine
Département environnement urbain et rural – DEUR : Christian Thibault, directeur de département
Département urbanisme, aménagement et territoire – DUAT : Cécile Diguet, directrice de département
Étude réalisée par Ludovic Faytre, DEUR et Lisa Gaucher, DUAT, avec le concours de Marine Dore et Simon Carrage, DEUR
Cartographie réalisée par Gianluca Marzilli (DUAT) et Laetitia Pigato (DEUR)
Recherche iconographique : Julie Sarris, Perrine Drapier
N° d’ordonnancement : 08.22.021

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