

Acteurs,
sites et productions possibles issus de l'agriculture urbaine

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Un
renouvellement structurel de l’agriculture francilienne
La
diminution du nombre d’exploitations maraîchères
en Île-de-France est le résultat de deux dynamiques
concomittantes : d’une part la raréfaction du foncier
agricole francilien et d’autre part la spécialisation
de l’agriculture en faveur des grandes cultures céréalières.
La
Ferme des Possibles à Stains © Christophe
Fillieule / Plaine Commune
Depuis
1970, la surface agricole utile (SAU) en Île-de-France a
diminué au rythme de près de 2 000 hectares chaque
année pour atteindre le seuil de 569 000 ha au dernier
recensement. Cette érosion a été encore plus
marquante sur le territoire de la Métropole du Grand Paris
qui a vu ses surfaces agricoles se réduire de 7 254 ha
en 1970 à seulement 2 000 ha en 2018, soit une perte nette
de 72 % en moins de 50 ans. Ces 2 000 ha sont cultivés
à 50 % pour du blé tendre ; 29 % d’autres
céréales ; 8,5 % des cultures industrielles ; près
de 7 % des prairies et du fourrage et seulement 5 % produisent
des légumes et des fleurs.
Cette réduction du foncier s’est accompagnée
d’une disparition, depuis les années soixante-dix,
des deux tiers des exploitations franciliennes. On n’en
dénombrait plus que 5 310, toutes filières confondues,
en 2012, dont 75 % étaient spécialisées dans
les grandes cultures. Seuls 9 % de ces exploitations étaient
maraîchères, fruitières et horticoles.
Cette baisse du nombre des exploitations est également
le fait de la spécialisation agricole dans les grandes
cultures céréalières et industrielles, dont
une des conséquences directes est l’agrandissement
des surfaces exploitées. Ceci s’explique en partie
par l’impact du mode d’attribution des aides européennes
au prorata de la surface de culture, mais aussi par l’optimisation
et la mécanisation des travaux permettant de meilleurs
rendements.
Si en 1970 la taille moyenne d’une exploitation était
de 46 ha, elle est de 113 ha en 2010 : +146 %. Aujourd’hui,
48 % des exploitations franciliennes - 2 600 - sont de plus de
100 ha. Ces grands propriétaires agricoles totalisent à
eux seuls 84 % de la SAU francilienne, 478 900 ha.
Cette
croissance a notamment entraîné l’agrandissement
des structures exploitantes selon un modèle économique
proche des entreprises. On compte, en 2010, 47 % de sociétés
agricoles - EARL, SCEA et GAEC - exploitant près de 60
% de la surface agricole utilisée de la région.
Cette
spécialisation s’est faite au détriment des
autres cultures et notamment des cultures maraîchères
également pénalisées par le manque de main-d’œuvre.
Les évolutions récentes liées aux attentes
citoyennes, soutenues par les politiques publiques, se traduisent
par un renouvellement des cultures maraîchères, des
formes d’exploitation et de distribution.
Rééquilibrer
l’agriculture dans l’urbain : le défi de l’alimentation
durable
La
Métropole du Grand Paris compte 2 000 ha d’espaces
agricoles, soit 2 % de
la surface totale.
Ces espaces agricoles se situent principalement aux confins orientaux
de la métropole : Plateau Briard, La-Queueen-Brie, Noiseau,
Rungis, Tremblay-en-France, Coubron notamment. Ils se répartissent
à 35 % dans le T11 - 690 ha -, 24 % dans le T7 - 486 ha
-, 5 % dans le T12 - 104 ha - et 2 % dans le T9 : 42 ha.
18
producteurs ont été recensés sur le territoire
métropolitain, dans le cadre de cette étude : 9
producteurs d’aromates et miel, 5 de fruits et légumes,
3 maraîchers et 1 vignoble. Ces 18 producteurs représentent
20 % des exploitations métropolitaines. Le tiers de ces
producteurs fournit des ruches et 12 d’entre eux fournissent
au moins une structure de livraison de panier, ComptoirLocal notamment.
Actuellement,
sur les 3 349,7 ha de projets jouxtant ou recouvrant entièrement
des terres agricoles, 26 % des terrains agricoles, soit 528,7
ha, sont menacés par les grands projets d’aménagement
métropolitains. Le nord-est et le sud apparaissent comme
les espaces les plus exposés : 193,5 ha de terres agricoles
au sud de l’aéroport Roissy-Charles de Gaulle et
71,7 ha au nord de l’aéroport d’Orly.
©
Apur
Alors
que près de 2 000 hectares d’espaces ouverts ont
disparu au profit d’espaces bâtis entre 1990 et 2012,
dont les trois quarts par extension de l’urbanisation sur
des espaces agricoles, boisés et naturels, le développement
d’une agriculture urbaine et périurbaine respectueuse
de l’environnement apparaît comme un enjeu majeur
de la Métropole du Grand Paris.
La
Métropole souhaite intégrer au SCoT des objectifs
en matière de développement des surfaces agricoles.
Cela passe par la sanctuarisation des parcelles agricoles existantes
et leur intégration pérenne dans l’espace
urbain ; la recherche de nouveaux lieux pour multiplier jardins
partagés, potagers, vergers et lieux d’agriculture
au sein de l’espace urbain ; la recherche d’une urbanisation
des franges qui protège et respecte les espaces
agricoles et favorise le maintient et le développement
d’une ceinture maraîchère. La Métropole
souhaite également mettre en œuvre un appel à
projet de type Parisculteurs à l’échelle
métropolitaine afin de faciliter l’accès au
foncier aux porteurs de projet d’agriculture urbaine et
périurbaine respectueux de l’environnement.
L’inscription
dans l’espace métropolitain de lieux favorables à
la production et au développement de filières courtes
d’approvisionnement, avec un nombre d’intermédiaires
et une distance réduite entre producteurs et consommateurs,
sera porteuse d’une approche positive et renouvelée
d’un système alimentaire plus durable.
D’après
Anne-Cécile Daniel et al., 2013 |
Les
acteurs du monde politique et agroalimentaire agissent de manière
à redynamiser le secteur, par le biais d’actions
de soutien financier et d’engagement en faveur de l’agriculture.
Ces actions peuvent être aussi bien publiques que privées
et relèvent de la volonté de valoriser
le foncier disponible, de faciliter l’installation agricole
en milieu urbain et périurbain et d’encourager les
nouvelles formes d’économies sociales et solidaires.
Ces
initiatives sont notamment liées à la volonté
des acteurs publics d’atteindre les objectifs fixés
par le Plan d’Alimentation Durable de la Ville de Paris.
Ce dernier vise notamment à augmenter la part à
50 % d’alimentation durable en restauration collective d’ici
2020. En 2017, sa part était déjà de 38 %.
Ce plan a plusieurs objectifs : écologique - préservation
de l’environnement -, économique - hausse de l’emploi
local -, sanitaire - amélioration de la qualité
de l’air - et social : renforcement du lien producteur/consommateur.
Les acteurs privés de la restauration collective sont donc
incités à s’approvisionner auprès de
producteurs locaux afin de garantir une alimentation durable dans
leurs restaurants.
Plusieurs actions et initiatives sont prises par les différents
acteurs du territoire parisien et régional. Ces actions,
engagées par des acteurs publics et privés, ont
pour objectif d’identifier et de valoriser les terrains
disponibles susceptibles d’accueillir une production agricole.
L’ensemble
de ces initiatives fournit un socle favorable pour les acteurs
privés et publics afin d’agir en en faveur d’une
alimentation plus durable. La diversité des initiatives
met en lumière les possibilités agro-alimentaires
à l’échelle parisienne et régionale.
L’intégration progressive de formes agricoles dans
les projets urbains et métropolitains permet d’évaluer
le poids des exigences nouvelles des consommateurs. La Ville de
Paris, à travers les différents appels à
projets et le soutien aux initiatives citoyennes, est aujourd’hui
devenue un acteur majeur de l’agriculture urbaine et péri-urbaine.
Celle-ci
constitue ainsi un moyen de rapprocher les acteurs publics aux
acteurs privés tout en valorisant les avantages de la nature
dans la ville, à savoir la diversification des productions,
une meilleure alimentation, l’utilisation du foncier disponible,
l’amélioration du lien social, une baisse de la pollution… |

© Apur |