
Évolution
spatiale des magasins de chaînes bio à Paris entre
2003 et 2017

Magasin
Bio c’ Bon, Paris 12e ©
Apur- JC Bonijol

Magasin Bio Naturalia, Paris 11e
© Apur- JC Bonijol
Taux
d'évolution des points de vente
en alimentation durable entre 2003 et 2017 par arrondissement
Source : BDCom, Apur |

Évolution
spatiale des points de vente
indépendants de l'alimentation durable
Magasin
Bio Les Nouveaux Robinson, Paris 12e
© Apur- JC Bonijol
|
Les
grandes enseignes au cœur de la dynamique
L’offre
alimentaire durable à Paris a considérablement augmenté
depuis maintenant deux décennies, passant de 123 à
245 entre 2003 et 2018.
En
2017, les plus grandes chaînes proposant une alimentation
durable à Paris se répartissent selon 7 marques
: Carrefour Bio, Franprix Noé, Naturalia, Bio C’Bon,
Biocoop, La Vie Claire et Les Nouveaux Robinson. L’évolution
des points de vente de grande enseigne au cours des quinze dernières
années est spectaculaire et la part du bio dans l’offre
commerciale augmente considérablement. Alors que nous en
comptions seulement 33 à Paris en 2003 - 20 points de vente
Naturalia, 10 La Vie Claire et 2 Biocoop -, ils sont aujourd’hui
157 dont 40 % pour la seule chaîne Naturalia.
Ces
grandes enseignes bio maillent le territoire parisien avec quelques
zones de carence, notamment dans le VIIIe et le XVIe arrondissements.
À l’inverse, des concentrations commerciales sont
notables dans les arrondissements centraux et dans le XVe arrondissement.
Les IXe et Xe arrondissements comptent respectivement 4,1 et 4,8
points de vente en grande enseigne au km², le XIe arrondissement
3,3 et les 4 premiers arrondissements 2,5 points de vente.
Ces
grandes enseignes se répartissent en deux catégaries,
les chaînes spécialisées et les magasins de
chaîne dits traditionnels.
Les chaînes spécialisées Biocoop, Bio C’Bon
ou encore La Vie Claire se positionnent comme des acteurs majeurs
du paysage commercial de l’alimentation durable à
Paris. D’une surface moyenne de 250 m², ces supérettes
spécialisées occupaient, en 2017, dans la même
catégorie de points de vente, 25 % de l’offre commerciale.
Leur part se retrouvait à 7 % sur l’ensemble des
magasins alimentaires généralistes parisiens.
Cette évolution du paysage commercial parisien s’accompagne
d’une part de plus en plus importante accordée à
l’alimentation durable dans les magasins de chaîne
dits traditionnels. Le groupe Casino est un des acteurs les plus
actifs sur ce marché. En 2008, le groupe a racheté
les magasins Naturalia puis, en 2011, a lancé dans ses
points de vente la gamme de produits Le Meilleur d’Ici
promouvant les produits locaux. En 2015, le groupe a lancé
dans ses magasins Monoprix la gamme Made in pas très
loin, correspondant à la vente de produits issus d’exploitations
agricoles situées dans un rayon de 100 à 160 km
des points de vente. Enfin, Casino a lancé en 2017 les
Franprix Noé, enseigne privilégiant l’alimentation
bio et responsable. Il en existait 5 à Paris en 2018. Le
groupe Carrefour a quant à lui ouvert ses propres magasins
Carrefour Bio à partir de 2013 tout comme Auchan
et son magasin Cœur de nature ouvert en 2016.

Évolution
quantitative des grandes enseignes bio à Paris entre 2003
et 2017 Source : BDCom 2017

Taux
d'évolution des magasins spécialisés entre
2014 et 2017 Source : BDCom
2017
L’augmentation
de l’offre en alimentation durable également portée
par les épiceries bio et locales
On
comptait, en 2017, 5 690 commerces dits spécialisés
: ne distribuant qu’une gamme de produits uniques. Leur
nombre a augmenté de 300 entre 2014 et 2017, soit une hausse
de 6 %. Cette hausse s’illustre notamment par la création
de 22 nouveaux primeurs, 18 crémiers-fromagers, 55 pâtissiers,
59 cavistes ou encore 26 marchands de produits régionaux.
Les
épiceries bio et locales ont eu une croissance très
élevée depuis maintenant une décennie ; on
en comptait 88 à Paris en 2018, elles étaient 48
en 2003. À l’image de Causses ou Au
Bout du Champs, ces magasins ont ouvert respectivement 3
points de vente - Ier, IIIe et IXe arrondissements - depuis 2011
et 6 points de vente - Levallois-Perret, IXe, XIVe, XVIIe, XVIIIe
et XXe arrondissements - depuis 2013. Proposant une variété
de produits frais, locaux et bio, le développement de ces
magasins est considérable. La plupart des magasins rencontrés
ont ouvert entre 2013 et 2015.
Parmi les primeurs parisiens, la part des épiceries bio
et locales était fin 2018 de 20 % tandis qu’elle
n’était que de 2 % pour l’ensemble des magasins
alimentaires spécialisés de Paris. L’implantation
de ces points de vente constitue un véritable renouveau
dans le paysage commercial de Paris depuis le début des
années 2000.
La
Mairie de Paris a également ouvert les Halles alimentaires
afin de garantir l’accessibilité à tous à
l’alimentation durable : bio, local, peu cher, équitable.
La Halle Bichat (Xe) a ouvert en septembre 2017 tandis que la
Halle Broussais (XIVe) a ouvert en avril 2018. Ces deux Halles
proposent ainsi l’ensemble des produits que l’on retrouve
dans les épiceries : fruits, légumes, produits transformés…
L’augmentation
des commerces spécialisés concomitante à
la disparition des supérettes discounts s’explique
par deux raisons principales : le souhait de retrouver du lien
social dans son quartier et de s’inscrire dans une relation
de confiance avec son vendeur, mais aussi la volonté de
la part des consommateurs de retrouver une alimentation saine
et de meilleure qualité.
L’esthétique est un support important de ce renouvellement
commercial : une présentation des produits élaborée
- cagette et palette afin de renouer avec une idée du terroir,
d’un lien direct avec le producteur -, décor travaillé
ou encore un espace salon au cœur de l’épicerie.
La
mise en place de politiques publiques et la multiplication des
labels
La
Mairie de Paris, à travers l’ouverture des Halles
alimentaires, s’inscrit dans cette démarche de durabilité
alimentaire et écologique. Cette politique se traduit également
dans les appels à projet Parisculteurs qui participent
d’une réelle volonté d’avancer vers
une alimentation plus durable. La Ville de Paris soutient également
le développement des jardins partagés et familiaux,
porteurs d’une nouvelle dynamique écologique et sociale.
Les deux halles alimentaires parisiennes, rue Didot (XVe) et rue
Bichat (Xe) favorisent une alimentation saine à un tarif
abordable, une rémunération équitable des
producteurs et une production respectueuse de la terre et des
animaux.
Cette
nouvelle offre commerciale est également portée
par la région Île-de-France à travers le label
Mangeons Local du CERVIA : Centre Régional de
Valorisation et d’Innovation Agricole et Alimentaire. Il
garantit au consommateur l’origine francilienne des produits
ainsi qu’une volonté de la part du point de vente
d’investir et de valoriser son territoire. Aujourd’hui,
près de 900 professionnels sont inscrits dans cette démarche.
Parmi le label, nous distinguons 3 signatures destinées
aux points de vente qui ont la volonté de s’inscrire
dans ce schéma local, en proposant des produits de saison,
locaux et bio :
- Sélection
de produits d’ici, destiné aux commerces de
proximité, grands magasins spécialisés,
marchés, ruches, paniers en gare et 11 distributions
partenaires : 430 commerces recensés fin 2018.
- Ici,
la cuisine dans la rue, dédié aux chefs de
la cuisine de rue ; nous en comptions 16 fin 2018.
- Des
produits d’ici cuisinés ici, destiné
aux chefs de restauration à table, comptant 114 professionnels
fin 2018.
Ce
type de label consolide l’offre commerciale en alimentation
durable. Les points de vente - épiceries fines, magasins
de grandes enseignes -, les marchés découverts ou
encore les plateformes internet sont autant de structures permettant
de rendre accessible une alimentation durable et qualitative.
L’évolution
de l’offre en alimentation durable à Paris : les
booms 2007-2011 et 2014-2017
Le
nombre total de magasins d’alimentation durable est ainsi
passé de 123 en 2003 à 245 en 2018 soit une hausse
de près de 100 %. Deux périodes marquantes sont
mises en lumière dans l’évolution des points
de vente :
-
la première se situe entre 2007 et 2011 où l’on
assiste à une hausse de plus de 40 magasins à
Paris, soit 33 % en plus ;
-
la seconde entre 2014 et 2018 avec une nouvelle hausse de 40
points de vente, soit 20 % en plus.
Certains
arrondissements ont un taux d’évolution dépassant
les 500 % entre 2003 et 2018.
Cette dynamique est d’ailleurs remarquable notamment à
l’est et au nord de Paris. Certains arrondissements se dégagent
avec une part plus importante du total parisien : 10 % soit 25
magasins pour le seul XIe arrondissement. Les arrondissements
périphériques totalisent à eux seuls 137
points de vente soit 56 % de l’ensemble de l’offre.
Sur la période 2003-2018, la plupart des magasins (26 %)
profitent de locaux vacants pour s’installer. 11 % des points
de vente s’installent en lieu et place de supermarchés
alimentaires - Franprix, Spar, G20, Dia - et 10 % remplacent des
magasins de prêt-à-porter. 10 % des points de vente
ont également remplacé des magasins spécialisés
d’ameublement et d’électroménager
Les
marchés parisiens comme circuit commercial traditionnel
Paris
dispose de 10 marchés couverts et 83 marchés découverts,
ouverts en moyenne deux matinées par semaine, de 7h à
14h. Ces marchés offrent la possibilité de s’alimenter
en fruits, légumes, viande et poissons, issus pour certains
d’exploitations franciliennes.
Ces
93 marchés sont répartis entre 3 gestionnaires -
la société Cordonnier frères, le groupe Bensimon
et la société Dadoun - et tous sont gérés
par le bureau des marchés de quartier de la Ville de Paris.
Quatre
de ces marchés sont exclusivement bio :
-
Boulevard Raspail (VIe) : 32 commerçants dont 10 maraîchers,
9 bouchers, 10 épiciers - épices, miel, pain,
confitures, fleurs, biscuits… -, 3 poissonniers ;
-
Boulevard des Batignolles (XVIIe) : 40 commerçants
dont 11 maraîchers, 12 épiciers - légumes
secs, thés, miel, fleurs, biscuits… -, 7 bouchers,
5 boulangers,
3 poissonniers, 2 fromagers ;
-
Place Constantin-Brancusi (XIVe) : 5 commerçants dont
1 maraîcher, 1 boucher, 1 poissonnier, 1 fromager, 1
épicier : huile d’olive ;
-
Le Centquatre (XIXe) : 5 commerçants dont 1 boucher,
1 maraîcher, 1 fromager, 1 boulanger, 1 épicier
: farines, thés, fruits secs…
Un
cinquième marché bio a ouvert à l’automne
2018 place Pierre Chaillet (XIe). Deux autres seront créés
d’ici la fin de la délégation de service public
des marchés parisiens.
Quatre marchés sont partiellement bio : boulevard Richard
Lenoir (XIe), cours de Vincennes (XIIe), rue Saint-Charles (XVe),
place de la Réunion (XXe).
Les
autres marchés parisiens proposent également des
produits issus de l’agriculture biologique de façon
plus ponctuelle. On y dénombre 91 commerçants bio
dont 71 sont maraîchers, 7 sont bouchers, 6 sont épiciers
- traiteur, boisson -, 5 sont boulangers et 2 sont fromagers.
Les
nouveaux modes de commercialisation de l’alimentation durable
La
distribution change de visage et prend des formes diverses et
nouvelles depuis le début des années 2000. C’est
le cas notamment de structures telles que les AMAP - Association
pour le Maintien d’une Agriculture Paysanne -, la Ruche
qui dit Oui ou encore les services de livraison de panier. On
en compte ainsi plus de 120 à Paris. Les AMAP se distinguent
surtout par l’absence d’intermédiaires entre
le consommateur et le producteur, au contraire de la Ruche qui
dit Oui ou des structures de livraison de panier qui agissent
en tant que tiers entre les consommateurs et les producteurs.
Ils fixent donc les prix d’achat et de vente.
Les
AMAP
Les AMAP sont les seules à fonctionner de manière
directe, entre les consommateurs et le(s) producteur(s). Une AMAP
naît de ce partenariat qui détermine alors la production
de la saison.
Les produits sont payés en avance, pour 6 ou 12 mois. En
Île-de-France, la première AMAP est apparue en 2003
à Pantin, en Seine-Saint-Denis, initiée par un maraîcher
installé à Chaussy, dans le Val d’Oise. En
2017, 355 étaient recensées en Île-de-France
dont 61 à Paris. Le nombre moyen de paniers vendus par
AMAP à Paris est de 36 par semaine. Le grand panier de
légumes est en moyenne à 17 € et le petit panier
à 10 €. Parmi les producteurs fournissant les AMAP
parisiennes, 112 sont franciliens, dont 67 ayant pour production
principale le maraîchage, 14 l’élevage, 11
l’arboriculture, 9 les céréales, 8 le miel
et 3 les produits laitiers.
La
Ruche qui dit Oui
Cette entreprise, créée en 2011, a pour objectif
de rendre accessible à tous des produits locaux. Le processus
est en partie dématérialisé. En effet, le
client s’inscrit directement sur le site internet de la
Ruche la plus proche de chez lui, puis passe commande
d’au moins un produit : légume, fruit, fromage, pièce
de viande, produit transformé… Chaque semaine, la
Ruche emprunte un local afin de mettre à disposition, directement
par les producteurs, les commandes des clients. En septembre 2017,
50 ruches étaient actives à Paris pour 215 producteurs
livrant les ruches chaque semaine. Ces producteurs se situent
dans un rayon de 250 km maximum de la ruche avec laquelle ils
travaillent.
Les 50 ruches parisiennes regroupent 150 000 clients - ou, au
moins, inscrits - et 76 commandes sont effectuées en moyenne
par distribution, contre 35 en France. À titre d’exemple,
un total de 6 000 commandes a été passé durant
le mois de septembre 2017 dans l’ensemble des 50 ruches
parisiennes. Une commande s’élève à
hauteur de 38 € en moyenne.
La mise en réseau directe entre le consommateur et le producteur
permet de renouer les liens entre les acteurs. La perte de la
transparence et le manque de visibilité quant à
l’origine du produit s’inscrivent directement dans
le changement de mentalité des consommateurs. La possibilité
pour celui-ci de pouvoir échanger avec le producteur constitue
un véritable changement dans la manière de consommer.
De plus, l’origine des produits - toutes les filières
sont ici représentées, de la viande aux céréales
en passant par les produits transformés - est connue, assurant
aux clients une qualité supérieure de leur alimentation.
Les
services de livraison de paniers
De plus en plus de structures spécialisées dans
la distribution et la commercialisation de paniers - tous produits
confondus - se positionnent à Paris. Leur approche commerciale
est similaire aux Amap et aux Ruches - préférence
donnée au local, équitable avec les producteurs,
favorise le bio - mais la distribution est différente.
Ces structures distribuent les paniers précommandés
sur internet dans le lieu choisi par le consommateur, lieu de
travail ou lieu de résidence généralement.
Paris est ainsi couvert par au moins 11 structures de ce type
: ComptoirLocal, Rutabago, Les Paniers Bio du Val de Loire, Patisson,
Bioacasa, PotagerCity, CookOnly, Campanier, TousPrimeurs, Mes
Paniers Bio, Mon-Marché.
Le ComptoirLocal, lancée en 2015, est une plateforme internet
proposant aux clients une variété de produits exclusivement
franciliens. Ce système de précommande fonctionne
en flux tendus, où le client doit attendre 48h minimum
afin de se faire livrer. La demande est soumise à l’offre
et donc à la saison.
La
Food tech
Ces nouvelles techniques de distribution font partie d’un
nouveau concept apparu au début des années 2010,
la FoodTech, appellation qui regroupe l’ensemble des entrepreneurs
et des start-up du domaine alimentaire - de la production au consommateur
final - qui innovent sur les produits, la distribution, le marché
ou le modèle économique selon DigitalFoodLab. La
nouvelle dynamique alimentaire parisienne s’accompagne également
de la création d’entreprises et de start-up innovantes.
DigitalFoodLab, agence de conseil spécialisée dans
la FoodTech, en recense 472 en France, dont 296 en Île-de-France.
Ces structures entrepreneuriales s’intéressent à
l’ensemble de la chaîne agroalimentaire. L’agence
en distingue six types :
-
AgTech : entreprises visant à innover dans le domaine
de l’agriculture ;
-
Foodscience : innovation afin d’améliorer les produits
alimentaires ;
-
Foodservice : entreprises ayant pour but de renouveler les services
de restauration ;
-
Media : start-up ayant pour objectif de faire découvrir
de nouveaux produits aux consommateurs ;
-
Coaching : start-up visant à sensibiliser les consommateurs
pour une meilleure nutrition ;
-
Retail & Delivery : start-up répondant aux défis
du e-commerce, logistique et gestion des magasins.
Les
entreprises du secteur de la Food-Tech sont de plus en plus nombreuses
et ont un impact important, comme en témoignent les 140
M€ d’investissements réalisés en 2016.
Ces nouveaux acteurs ont la volonté de s’inscrire
dans un temps long et innovent de manière à rendre
l’alimentation plus durable. Ainsi, des tendances pour les
start-up se dégagent à court, moyen et long terme
: une mise en réseau et une recherche de produits locaux
plus importants ; la transparence des produits sur leur origine
et leur qualité environnementale ; le rapprochement du
producteur et du consommateur.
De
plus, en 2019, La Poste devait expérimenter le déploiement
d’une offre de livraison de paniers producteurs à
domicile en lien avec les Parisculteurs. |