À
l’heure de l’objectif de neutralité carbone à
horizon 2050, portée par le Plan Climat Air Énergie parisien,
la grammaire ici développée vise à éclairer
quelques-uns des leviers pour tendre vers la ville neutre en carbone et
résiliente. Ces leviers concernent tous les systèmes de
la Ville
à travers la matière et l’énergie qu’elle
nécessite, mais aussi avec des actions visant une meilleure résilience
vis-à-vis des changements climatiques. Elle a été
développée à partir de travaux passés et actuels
de l’Apur. Elle est un ensemble dynamique qui a vocation à
s’enrichir régulièrement pour alimenter un PLU Carbone
Climat. S’inscrire dans une stratégie Carbone Climat permet
de mobiliser l’ensemble des potentiels d’un système
urbain et en particulier de réintégrer une dynamique qui
s’appuie sur le triptyque social / environnement / territoire.
Optimiser
les usages |
Multiplier
les usages du foncier en imbriquant les fonctions
Dans un contexte de foncier rare, la recherche d’économie
d’espace et de mutualisation doit inciter à tirer
le meilleur parti de chaque site. Chaque projet doit être
envisagé comme un potentiel, une ressource qui doit pouvoir
contribuer au fonctionnement de la ville.
Les
programmes d’habitat ou d’activités doivent
aujourd’hui s’enrichir de fonctions complémentaires,
végétalisation, agriculture urbaine, équipements,
services urbains, logistique ou production d’énergie,
qui chacune contribuent à adapter la ville aux évolutions
du climat et aux besoins des habitants.
Le
projet de centre de maintenance du tramway T3 a ainsi été
l’occasion de requalifier profondément son environnement
en améliorant l’offre sportive initiale tout en contribuant
à la création de logements étudiants et en
pérennisant l’activité portuaire sur le canal
de l’Ourcq.
La
restructuration et l’aménagement du site des Ateliers
Vaugirard par le groupe RATP constituent un autre exemple d’optimisation
et d’intégration des surfaces avec la réalisation
d’un programme industriel et urbain. Celui-ci comprend le
maintien des ateliers restructurés des trains de la ligne
12, 400 logements, des équipements publics, une nouvelle
rue et des espaces verts sur les 2,3 ha de l’emprise initiale.
Exploiter
le gisement du déjà-là
La
ville de demain sera constituée à 90 % de celle
qui est déjà là, c’est donc l’usage
de ce stock qui devra évoluer. La ville regorge de lieux
sous exploités, ou exploités seulement pendant certaines
plages horaires ; locaux vacants, parkings, sous-sols, équipements,
cours d’école, friches, infrastructures ou espaces
publics.
Ateliers
Vaugirard (XVe) :
Perspective, vue depuis les Ateliers de Maintenance des Trains
©
CHRIST & GANTENBEINCHRIST & GANTENBEIN
– Dominique Lyon Architectes
Ces
ressources constituent un gisement important pour répondre
aux nouvelles attentes des habitants en minimisant les émissions
de carbone. Ainsi l’utilisation des parkings vides plutôt
que la création de nouvelles places, la réinvention
de nouveaux usages pour les soussols, la reconquête des
infrastructures et des espaces publics, la fermeture de voies
pour créer des espaces verts, ou l’ouverture plus
large des équipements publics, sont autant de leviers à
actionner par la mise à disposition d’outils pour
faciliter l’animation citoyenne de ces espaces.
Institutions publiques et acteurs de la société
civile doivent s’associer pour créer les conditions
nécessaires à l’exploitation de ces lieux
divers.
Cette
optimisation nécessite l’invention de nouveaux dispositifs
portés à la fois par la révolution numérique
et l’engagement citoyen, proposant une approche résolument
centrée sur l’usage et une large ouverture du jeu
d’acteurs impliqués dans la conception et la mise
en oeuvre des projets.
Le
succès des expérimentations engagées depuis
plusieurs années au travers d’opérations d’urbanisme
temporaire comme par exemple les grands voisins ou le 6B fait
apparaître un potentiel d’avenir, tant ces initiatives,
extrêmement sobres en moyens, sont génératrices
de valeur pour les usagers, les propriétaires et le territoire,
en apportant des réponses à des besoins non couverts
: location d’espace, espaces festifs, logement de personnes
précaires... |
Le
complexe Ladoumègue, XIXe : un centre sportif, le centre
de maintenance et de remisage du T3, 180 logements étudiants,
la pérennisation et l’insertion du port Serurier
©
ph.guignard@air-images.net
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Le 6B, un lieu de travail de culture et
d’échanges autogéré installé
dans un ancien bâtiment industriel de 7 000 m², Saint-Denis
©
le6b.fr
Cours
d’école, rue Dussoubs, IIe ©
Google
Les
Grands Voisins, XIVe, la terrasse
de la Lingerie ©
Alexia Lagorce (Yes We Camp) |
Végétaliser,
désimperméabiliser |
Tranchée
continue avec bordure, Paris IVe ©
Apur
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Tranchée
continue recueillant les eaux pluviales, Portland
©
CC by NACTO - NC
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La
neutralité carbone d’une ville passe par l’adaptation
climatique de ses espaces libres et de ses bâtiments afin
d’éviter le recours à la climatisation dans
le cadre du réchauffement global. Les villes d’aujourd’hui
ont hérité de pratiques d’imperméabilisation
des espaces publics via l’usage des bitumes et asphaltes
dont la conséquence est, entre autres, un stockage de l’énergie
solaire le jour et le relargage de cette énergie la nuit
engendrant un îlot de chaleur urbain.
Rompre
l’intensité carbone de l’espace public
La
conception de l’espace public est héritée
d’une vision fonctionnelle de la ville. La chaussée
bitume est adaptée aux circulations motorisées.
Les épaisseurs de matériaux, les différentes
sous-couches sont dimensionnées dans cette seule perspective
utilitaire. Or, l’enjeu climatique réinterroge cette
façon de concevoir l’espace car les matériaux
employés sont intenses en carbone puisqu’ils sont
des dérivés du pétrole, de plus leur impact
climatique nocturne en réchauffant la ville est désastreux.
Enfin le nécessaire recours à une maintenance régulière
en fait des matériaux non pérennes, rapidement obsolètes.
Des alternatives peuvent être envisagées et surtout
réinventées. L’emploi de matériaux
pérennes comme les pavés apportent une réponse
à l’obsolescence des matériaux employés
aujourd’hui. Le stabilisé est également un
matériau au faible contenu carbone et surtout à
la plus-value climatique très intéressante : son
incapacité à stocker la chaleur en fait un matériau
naturellement frais la nuit.
Désimperméabiliser
L’imperméabilisation
des espaces libres conduit au rejet systématique des eaux
pluviales dans le réseau d’assainissement. Or l’eau
joue un rôle essentiel dans l’adaptation de la Ville
au changement climatique. L’évaporation de l’eau
permet un rafraîchissement de l’air. Les sols perméables
permettent donc d’éviter la surcharge du réseau
d’assainissement et favorisent le rafraîchissement
urbain. La nécessité de désimperméabiliser
la ville est rappelée dans le règlement d’urbanisme
via l’article 15. Des
structures partiellement perméables comme les pavés
enherbés sont également un compromis intéressant
entre les contraintes d’usage de l’espace public et
la nécessité de prise en compte de la résilience
climatique.
Végétaliser
La
résilience climatique de la Ville passe également
par un rafraîchissement actif de l’espace public.
Les végétaux peuvent assurer ce rôle par évaporation
de l’eau contenu dans le sol. Ils apportent également
de l’ombre sur l’espace public. Toutes les strates
végétales apportent une plus-value, les arbres ayant
un rôle particulièrement intéressant en journée
de par leur capacité d’ombrage.
Ainsi, les essences d’arbres retenues dans les alignements
de voirie peuvent désormais être appréciées
au regard de leurs qualités climatiques : densité
de feuillage assurant un ombrage efficace de l’espace urbain,
résistance de l’arbre aux périodes de sécheresse...
La lutte contre l’îlot de chaleur passe par le développement
d’une végétalisation diffuse. Les bâtiments
peuvent être le support d’une végétalisation
verticale des façades et des toits. |
Rue
Georges Eastmann, XIIIe ©
Apur
Désimperméabiliser,
là où c'est possible
Végétation
diffuse
sur l’espace public ©
Apur |
Espace
planté non connecté,
boulevard Bourdon, Paris IVe ©
Apur
Espace
planté recueillant les eaux de chaussée, Les
4 000, La Courneuve (93) ©
Apur
|
Passeig
de Sant Joan, Barcelone ©
Adria Goula |
La végétalisation est relativement développée
à Paris puisqu’on recense aujourd’hui environ
30 ha de murs végétaux. L’intérêt
de la végétalisation verticale à l’aide
de plantes grimpantes, telle la vigne vierge, réside dans
la faible empreinte carbone du dispositif. La plante ne nécessite
presque pas d’entretien, à part une taille bi annuelle
pour prévenir les débordements en toiture, et elle
apporte un rafraîchissement des espaces adjacents et une
humidification de l’air. |
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Mutualiser
à toutes les échelles, du bâti au quartier |
Paris
est une ville dense et mixte. Tirer parti de cette spécificité
en dépassant les limites - propriété, parcelle
- et les freins juridiques et techniques inhérents constitue
une opportunité pour mutualiser à tous les
étages.
Source
: DGFip 2011
Quand
certains immeubles se chauffent, d’autres ont besoin d’être
refroidis. Ces besoins se rencontrent en mi-saison et en hiver
quand certains bâtiments, les immeubles ressources - grands
magasins, immeubles de bureaux - climatisent alors que leurs voisins
utilisent le chauffage. La création de boucles locales
d’énergie, des réseaux de faible dimension,
permettra d’échanger l’énergie entre
ces différents types de bâtiments.
Renforcer
la solidarité entre bâti neuf et stock
La
création d’un bâtiment pourrait être
une opportunité pour servir et améliorer son environnement
en mettant à disposition de ses voisins un apport spécifique
: exploitation de ressources ÉnR & R, tête de
pont d’une boucle locale d’énergie...
Profiter
de l’effet de masse
Les
Zones de Rénovation Concertée pourront faciliter
le regroupement de plusieurs immeubles ou copropriétés
qui souhaitent lancer des opérations de réhabilitation
afin d’en mutualiser les moyens et d’en limiter le
coût ; mais aussi à l’échelle micro
en facilitant l’empiétement sur l’espace privé
de la parcelle voisine pour réaliser une isolation thermique
extérieure.
CORDEES,
Clichy-Batignolles (XVIIe)
La
ZAC de Clichy-Batignolles repose en grande partie sur l’exploitation
d’ÉnR : un puit géothermique dans l’Albien
permet d’alimenter en chaleur une boucle d’eau chaude
à hauteur de 85 %, et 35 000 m² de panneaux solaires
photovoltaïques complètent le dispositif. Le projet
CORDEES vise à travers la mise en place et le pilotage
d’un réseau énergétique intelligent
- smart-grid - à tendre vers un bilan carbone neutre en
rapprochant performances réelles et théoriques.
En plus du volet technique, ce projet intègre un volet
humain essentiel afi n entre autres de sensibiliser les publics
spécifiques. Cela se traduit par la mise en place d’une
plateforme accessible aux utilisateurs du quartier pour piloter
en temps réel productions et consommations.
Vers
le TÉGPOS, Nanterre (92)
Le
quartier Hoche à Nanterre - 635 logements BBC alimentés
par une chaufferie biomasse bois-gaz - a été le
lieu d’une initiative originale sur le plan énergétique
: le réseau de chaleur alimenté par la chaufferie
biomasse permet d’alimenter en eau chaude sanitaire et en
chauffage les logements de l’éco-quartier mais aussi
les 916 logements sociaux de la Cité Komarov voisine. Cette
externalisation de l’énergie produite permet d’améliorer
la dimension environnementale du territoire dans son ensemble.
Cet exemple montre l’intérêt de passer de l’échelle
du bâtiment - BÉPOS - ou de l’opération
à celle du territoire : TÉGPOS, Territoire à
Énergie Globale Positive. |
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Le
quartier Hoche et la Cité Komarov à Nanterre (92),
un exemple de solidarité territoriale ©
Franck Boutté Consultants
La
ZAC de Clichy-Batignolles (XVIIe) |
autour
de son jardin ©
ph.guignard@air-images.net
|
Au
sein des travaux exploratoires Paris 2050 mené à l’Apur,
l’Îlot République
(XIe arrondissement) illustre d’autres types de mutualisation
possible avec des échanges de chaleur/fraîcheur entre
programmes, des partages de toitures végétalisées
rendues
accessibles, de production d’énergie, une mutualisation
des sous-sols... |
Vers
un PLU Carbone Climat |
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Le
Plan d’Occupation des Sols de 1977 était un document
privilégiant la forme urbaine (zonages et gabarits). Le
Plan Local d’Urbanisme de 2006 cherchait à corriger
les déséquilibres entre l’Est et l’Ouest
parisien. La récente modification du PLU de juillet 2016
a permis avec l’article 15 d’intégrer des dispositions
à caractère environnemental pour mieux prendre en
compte la transition énergétique, traductions réglementaires
de documents tels que le Plan Climat Air Énergie, le plan
Biodiversité ou encore le plan Paris Pluie, récemment
adoptés.
Un
PLU Carbone-Climat (PLUCC) pourrait permettre d’ancrer plus
fortement les objectifs climatiques, énergétiques,
et de neutralité carbone et tous les leviers qui permettront
de les atteindre : réemploi, recyclage, réhabilitations
thermiques, utilisation de matériaux bas carbone, exploitation
des ressources énergétiques locales, mutualisation,
stockage de carbone, mais aussi les autres thèmes qui n’ont
pas ou peu été développés dans ce
document comme l’essor de mobilité bas carbone, de
circuits économiques courts, d’agriculture urbaine,
etc. L’ensemble des éléments présentés
sous le vocable Grammaire ne constitue pas une liste exhaustive.
C’est un premier pas qui illustre ce qui est déjà
engagé, et suggère une articulation avec les documents
d’urbanisme régulateurs.
L’urgence
d’agir, d’orienter les modes de fabrique de la ville
et faire de Paris une ville neutre en carbone et résiliente
implique de renforcer davantage le cadre réglementaire
dans cette direction et d’intégrer pleinement dans
les choix de planification les enjeux et impacts en terme de climat
et de carbone, thèmes qui se surimposent à tous
les autres en les conditionnant.
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Vers un PLU Carbone-climat
Éléments
de grammaire
pour une ville neutre et résiliente
Source : APUR
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Grammaire
pour une ville neutre en carbone et résiliente
........Observatoire
de la ville durable
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Le
troisième Plan Climat Air Énergie de Paris,
adopté le 21 mars 2018, vise à faire de Paris
une ville neutre en carbone d’ici 2050. L’Apur,
qui travaille sur les thématiques environnementales
depuis le début des années 2000 a souhaité
à partir de ses travaux sur le cadre bâti, l’énergie,
l’eau, le climat, les nouveaux modes de fabrique de
la ville, dresser des éléments de grammaire
pour contribuer à l’atteinte de cet objectif.
Tirer parti au maximum de l’existant, massifier la réhabilitation
des bâtiments, privilégier les matériaux
bas carbone, exploiter les ressources locales, optimiser chaque
m², végétaliser et valoriser le cycle de
l’eau, et mutualiser constituent les 7 grands chapitres
de cette grammaire. Autant de possibilités pour accompagner
l’élargissement nécessaire des documents
réglementaires vers un cadre carbone climat. |
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L’Apur, Atelier parisien d’urbanisme, est une
association loi 1901 qui réunit autour de ses membres
fondateurs,
la Ville de Paris et l’État, les acteurs de
la Métropole du Grand Paris.
Grammaire
pour une ville neutre en carbone et résiliente
Directrice de la publication : Dominique Alba
Étude réalisée par : Paul Baroin, Julien
Bigorgne, Olivier Richard
Sous la direction de : Paul Baroin et Olivier Richard
Cartographie et traitement statistique : Apur
apur.org |
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