En
2014, il a été décidé en concertation avec
la DRIEE et les animateurs des sites Natura 2000 concernés de tester
une méthode
d'inventaire exhaustif des végétations aquatiques sur deux
rivières franciliennes en Natura 2000 et aux caractéristiques
assez différentes :
le Loing et l'Epte, toutes deux affluentes de la Seine.
En
Île-de-France, le réseau Natura 2000 est constitué
de 35 sites dont 25 au titre de la directive Habitats-Faune-Flore
(DHFF)
|
Parmi ceux-ci, onze sites sont concernés par des thématiques
liées aux cours d'eau, principalement localisés
dans la moitié sud de la région (fig. 1), ce qui
en fait l'une des composantes principales du réseau Natura
2000 régional. Cinq sites sont même strictement
dédiés aux cours d'eau tant du point de vue des
habitats que de la faune : poissons surtout ; ils concernent
les rivières du Petit Morin, de l'Yerres, du Vannetin,
du Dragon, et de l'ensemble Loing/Lunain (fig. 1). Les six autres
sites intègrent la thématique cours d'eau au sein
d'un ensemble plus large composé d'une mosaïque
de milieux et d'habitats de la vallée. Ils concernent
l'Epte, la Bassée, la haute vallée de l'Essonne,
l'ensemble des basses vallées de la Juine et de l'Essonne
et les petits cours d'eau des forêts de Rambouillet et
d'Yveline.
Ces milieux sont une composante importante du réseau
Natura 2000 francilien. Or, ils étaient jusqu'ici essentiellement
abordés sous l'angle de la faune aquatique au détriment
de la végétation, voire de la flore non directement
concernée : aucune espèce de la DHFF en rivière
en Île-de-France. Devant ce constat, il apparaît
donc essentiel de s'intéresser à ces milieux sur
les aspects habitats pour en avoir une connaissance plus fine.
L'habitat d'intérêt communautaire 3260 Rivières
des étages planitiaire à montagnard avec végétation
du Ranunculion fluitantis et du Callitricho-Batrachion
- généralement abrégé en Rivières
à renoncules - est le principal habitat concerné
en cours d'eau. Considéré d'enjeu modéré
par la hiérarchisation régionale sur les habitats
de la DHFF, cet habitat, bien que souvent dégradé
et en régression, est encore présent sur de nombreuses
rivières franciliennes, notamment hors du réseau
Natura 2000. De plus, la région ne présente pas
de responsabilité spécifique dans la conservation
de cet habitat largement réparti au niveau national.
Ces raisons ont conduit la DRIEE et le CBNBP à se lancer
dans une réflexion sur cet habitat au niveau régional.
Cela a consisté dans un premier temps à la validation
de la présence de l'habitat sur certains sites, puis
à la mise en place d’un protocole de suivi de son
état de conservation basé sur deux sites pilotes
en 2014, les zones spéciales de conservation FR 1102005
Rivières du Loing et du Lunain et FR 1102014
Vallée de l'Epte francilienne et ses affluents.
Figure 2 - Exemples de végétations indicatrices
de l'habitat 3260 en vallée de du Loing (77) : Potametum
pectinato - nodosi (à gauche)
et Sparganio simplicis - Ranunculetum fluitantis (à
droite)
TF © CBNBP/MNHN
|

Figure
1 - Localisation des sites Natura 2000 concernés par des
thématiques cours d'eau en Île-de-France (cercles
rouges) source
: DRIEE, 2015
 
|
|
L’habitat est abordé ici selon une logique biotope
et intègre de nombreuses végétations, celles
indicatrices mais également les communautés végétales
lentiques associées : Lemnetea minoris, Charetea fragilis,
Nymphaeion albae, Potamion pectinati, Ranunculion aquatilis
(fig. 3). Il est par contre limité aux végétations
aquatiques, les végétations amphibies des berges
n'étant pas concernées.
Figure
3 - Exemples de végétations associées de
l'habitat 3260 : annexe connectée en vallée du Loing
(77) du Nymphaeetum albo - luteae (à gauche) et
berge abritée en vallée de l'Epte (95) avec groupement
à Callitriche obtusangula et Callitriche platycarpa
(à droite)
TF
© CBNBP/MNHN |
Le
Loing est un cours d'eau de 166 km de long traversant trois
départements, l'Yonne, le Loiret et la Seine-et-Marne,
pour se jeter dans la Seine en amont de Paris à l'est
du massif de Fontainebleau. Il s'agit d'un cours d'eau de 30
à 70 m de largeur suivant les tronçons en Île-de-France,
au cours encore méandré avec de nombreuses îles.
Son débit important - 18,5 m3/s à Episy peu avant
la confluence avec la Seine - et son régime hydrologique
marqué - entre 3 et 300 m3/s suivant les saisons - en
font une des principales rivières de la région.
La période d’étiage s’étend
des mois de juin à août, et les périodes
de crue vont généralement de décembre à
mars. Les eaux sont basiques et méso-eutrophes à
eutrophes, principalement altérées sur les paramètres
nutriments et matière organique. Les principales sources
de pollution sont à la fois d'origine agricole - production
intensive et élevage - et domestique : eaux usées.
Le Loing est longé par le canal du Loing qui ne forme
qu'une seule entité avec la rivière en deux endroits,
où il est dit canalisé : de Nemours
à Moncourt-Fromonville et de Moret-sur-Loing jusqu’à
la confluence. Dans sa partie francilienne, ce cours d'eau fait
partie du site Natura 2000 Rivières du Loing et du
Lunain (FR 1102005). Ce site comprend les 38 derniers kilomètres
du Loing, pour environ 160 ha, de son entrée en Île-de-France
jusqu'à sa confluence avec la Seine et les 19 km du Lunain,
affluent direct du Loing. Un inventaire des habitats réalisé
en 2010 en canoë avec une cartographie par tronçon
avait permis de cartographier la présence de l'habitat
3260 sur 23,06 ha sur le Loing et 1,13 ha sur le Lunain.
Figure
5 - Le Loing à Moret-sur-Loing Alexh ©
GFDL
|
 |

Figure
6 - L'Epte au moulin de Fourges
Spedona © GFDL
Résultats floristiques
|
L'Epte
est une petite rivière de 113 km de long traversant cinq
départements, la Seine-Maritime, l'Oise, l'Eure, le Val-d'Oise
et les Yvelines, pour se jeter dans la Seine en aval de Paris
peu après Mantes-la-Jolie. Située au nord-ouest
de la région, elle fait une quinzaine de mètres
de largeur en moyenne et constitue la frontière avec la
région Haute-Normandie sur l'ensemble de son cours francilien.
Elle présente un débit de 9,3 m3/s vers la fin de
son cours - Fourges - pour un régime régulier oscillant
entre 3 et 50 m3/s au cours de la saison, car rejointe dans sa
partie aval par des affluents puissamment alimentés par
la nappe des plateaux crayeux du Vexin. Suite à l'aménagement
de la rivière dans les années 1980, le débit
est plus rapide et les crues moins intenses et fréquentes
qu'auparavant. La qualité des eaux, principalement basiques
et eutrophes, est considérée comme bonne sur le
plan physico-chimique sur cette partie de la rivière. Elle
intègre partiellement deux sites Natura 2000 : vallée
de l’Epte francilienne et ses affluents (FR 1102014)
en Île-de-France et vallée de l’Epte
(FR 2300152), côté Haute-Normandie, dont les deux
DOCOB ont été approuvés en 2010. Ces deux
sites comprennent également une partie des coteaux et des
affluents de la vallée mais ne sont pas jointifs et complémentaires.
Il en résulte que certains tronçons de la rivière
ne sont intégrés dans aucun des deux sites Natura
2000. L'ensemble, depuis l'entrée de la rivière
en Île-de-France jusqu'à la confluence avec la Seine,
représente un linéaire cumulé - bras secondaires
compris - d'une quarantaine de kilomètres pour une surface
d'une cinquantaine d'hectares. Sur le site francilien, l'habitat
3260 est donné comme couvrant 12,89 ha par le DOCOB, affluents
compris, tandis qu'elle est de 25,2 ha sur le site normand, surface
obtenue par des prospections en canoë en 2004. |
Hormis les espèces les plus patrimoniales qui ont été
précisément localisées, des inventaires
globaux des espèces aquatiques ont été
réalisés par secteurs communaux. Comme toute barrière
naturelle, les rivières constituent le plus souvent des
limites communales, voire départementales ou régionales,
comme dans le cas de l'Epte entre la Haute-Normandie et l'Île-de-France.
Au total, les inventaires sur le Loing ont été
divisés en dix secteurs d'inventaire floristique et en
huit secteurs sur l'Epte, le plus souvent à cheval sur
deux communes, parfois trois.
Le tableau récapitulatif (ci-contre) présente
l'ensemble des espèces recensées par rivière
avec leur statut d'indigénat, de rareté, de protection
et de menace en Île-de-France. Au total, 40 espèces
végétales aquatiques ou accommodats aquatiques
- formes submergées d'espèces terrestres - ont
pu être inventoriées sur le Loing et 30 sur l'Epte
ce qui les situe parmi les rivières les plus diversifiées
de la région et constitue globalement un bon niveau de
niveau de diversité floristique pour ces types de milieu.
De nombreuses nouvelles stations d'espèces rares ont
pu être découvertes dont une redécouverte
régionale sur le Loing, l’œnanthe des rivières
(Oenanthe fluviatilis), non revue depuis 1931 sur cette
rivière. Une néophyte en expansion, la Lentille
d'eau à turions (Lemna turionifera), a également
été découverte pour la région sur
les deux rivières. Celle-ci est certainement plus fréquente
dans la région et déjà installée
depuis quelques années mais passe facilement inaperçue
car de détermination délicate. Au total, sept
espèces inscrites à la liste rouge régionale
ont été recensées au cours de ces inventaires
: une en danger critique d'extinction (CR), deux en danger d'extinction
(EN), quatre vulnérables (VU), auxquelles on peut ajouter
deux espèces quasi menacées (NT). Une espèce
protégée au niveau régional mais non menacée,
Zannichellia palustris subsp. palustris, a également
été recensée. Une espèce localement
subspontanée ou plantée (Nymphaea alba)
et six espèces naturalisées ont également
été recensées sur ces rivières dont
la plupart présentent un potentiel envahissant : l'Azolla
fausse fougère (Azolla filiculoides), les élodées
(Elodea nuttalii et E. canadensis) et certaines
lentilles d'eau (Lemna minuta et L. turionifera).
Tous ces résultats montrent l'importance de prospecter
ces milieux d'accès difficile, souvent sous-prospectés
et recelant une flore particulièrement originale et souvent
rare. Les principales espèces emblématiques recensées
lors de ces inventaires sont ici brièvement présentées
et des cartes de répartition en annexes 4 et 5 donnent
les localisations de l'ensemble des stations inventoriées
des espèces les plus rares et menacées (CR, EN
et VU).
Résultats
phytosociologiques
La
diversité des végétations aquatiques rencontrés
est importante avec quatorze végétations différentes
inventoriées dont 11 pour le Loing et 7 pour l'Epte entre
les faciès lotiques et lentiques.
Végétations enracinées des eaux courantes
(Batrachion fluitantis)
Ces végétations se développent uniquement
au niveau des faciès lotiques des cours d'eau. Leur développement
est optimal en pleine lumière, au centre du cours d'eau
et dans des eaux peu profondes (radier). Elles forment souvent
des herbiers submergés, plus rarement flottants, en draperie
ondulant dans le sens du courant. Quatre associations ont pu
être identifiées sur le Loing et l'Epte dont une
seule, de convergence trophique et écologique, est présente
sur les deux cours d'eau. Elles se répartissent en fonction
de la taille du cours d'eau, du type de substrat, de la qualité
physico-chimique des eaux et de la vitesse du courant.
Végétations
enracinées des eaux stagnantes
(Nymphaeion albae, Potamion pectinati et Ranunculion
aquatilis)
Ces végétations se développent au niveau
des faciès lentiques des cours d'eau et dans les annexes
connectées. Leur développement est optimal à
l'abri du courant au niveau des anses, bras calmes, berges abritées
et amonts d'ouvrages. Elles forment des herbiers flottants ou
immergés souvent linéaires, supportant un ombrage
plus ou moins important. Sept associations ont pu être
identifiées sur les deux rivières ; certaines
ne sont pas spécifiques des cours d'eau et se retrouvent
également dans les systèmes de mares, d'étangs
ou de lacs. Elles se répartissent en fonction du type
de substrat, de la qualité physico-chimique des eaux
et de la variation des niveaux d'eau.
Végétations
flottantes libres des eaux stagnantes (Lemnetea
minoris)
Ces végétations se développent principalement
au niveau d'obstacles, les embâcles, qui obstruent le
courant du cours d'eau. Ils sont constitués par des troncs,
des branchages ou divers détritus emportés par
les eaux lors d’une crue puis bloqués dans le lit
de la rivière. Ils entravent très rarement entièrement
le lit mineur des deux cours d'eau, uniquement sur quelques
bras de l'Epte, et se situent le plus souvent sur les marges
ombragées. On retrouve également ces végétations
en amont des ouvrages, qui ont le même effet que les embâcles,
et sur les canaux liés à ces cours d'eau. Mobiles,
elles se déplacent en fonction des crues et ont donc
un développement très fluctuant. Elles forment
des herbiers flottants, non enracinés et très
recouvrant, vert brillant, auxquelles se mêlent beaucoup
d'espèces déracinées arrachées par
le courant. Deux associations ont pu être identifiées
propre à chacune des deux rivières.
|

Annexe
1 : Carte de localisation des prospections sur le Loing

Annexe
2 : Carte de localisation des prospections sur l'Epte
|
Habitats
présents |
 |
Selon les typologies européennes d'habitat, les deux
rivières prospectées relèvent des Cours
d’eau permanents non soumis aux marées, à
débit régulier selon la typologie EUNIS,
et Lit des rivières et Végétation
immergée des rivières, pour la typologie
CORINE biotopes. Les végétations rhéophiles
du Batrachion fluitantis peuvent être rattachées
aux déclinaisons plus précises de l'habitat
Végétations
eutrophes des cours d’eau à débit lent
et de l'habitat
Végétation
des rivières eutrophes. La présence de l’habitat
de la directive Habitats-Faune-Flore 3260 Rivières
à renoncules est avérée sur l'ensemble
des cours du Loing et de l'Epte prospectés. Sur chaque
cours d'eau, au moins un des polygones de tronçon connectés
entre deux ouvrages présente une végétation
rhéophile du Batrachion fluitantis indicateur de l'habitat.
De ce fait, tout l'hydrosystème connecté est considéré
comme fonctionnel et relevant de l'habitat 3260. Au niveau des
déclinaisons françaises de l'habitat présentes
sur chaque rivière selon le tome 3 sur les habitats humides
des cahiers d'habitats Natura 2000 :
-
le Loing peut être rattaché à l’habitat
élémentaire 3260-5 rivières eutrophes
(d’aval), neutres à basiques, dominées
par des Renoncules et des Potamots des cours d'eau basiques
assez larges et marqués par la présence du Sparganio
simplicis - Ranunculetum fluitantis, du Potametum
pectinato - nodosi et l'abondance d'espèces comme
Myriophyllum spicatum, Ceratophyllum demersum
et Potamogeton nodosus dans les cortèges ;
-
l'Epte se rattache par contre à l’habitat élémentaire
3260-6 Ruisseaux et petites rivières eutrophes
neutres à basiques par la présence du Callitrichetum
obtusangulae et l'abondance d'espèces comme Zannichellia
palustris, Callitriche obtusangula, C. platycarpa
et Berula erecta dans les cortèges.

Cet
habitat se développe sur le Loing et l'Epte de manière
particulièrement remarquable, ces deux rivières
constituant certainement l’une des meilleures expressions,
avec les noues de la Bassée, des végétations
rhéophiles de cours d'eau en Île-de-France. Les
végétations du Batrachion fluitantis
couvrent respectivement 9,54 ha sur le Loing, soit 6 % de la
surface de la rivière, et 5,06 ha sur l'Epte, soit 9,8
% de la surface de la rivière. Ces chiffres sont difficilement
comparables aux résultats obtenus par les DOCOB sur ces
deux rivières en 2010, à savoir 23,06 ha sur le
Loing et 38,09 ha sur l'Epte. En effet, même si on peut
considérer que les cartographies d'habitat de l'époque
correspondent globalement aux végétations du Batrachion
fluitantis, de nombreux biais empêchent une réelle
comparaison. Sur le Loing, la cartographie de présence
des habitats issue du DOCOB a été effectuée
par tronçon, c'est-à-dire que si la végétation
indicatrice était présente, alors tout le tronçon
inventorié était considéré comme
relevant de l'habitat. Sur l'Epte, l'habitat a été
cartographié par grands polygones homogènes et
a également inventorié sur des secteurs d'affluents
non prospectés en 2014. Au contraire, de grandes portions
de la rivière n'ont pas été prospectées
pour les DOCOB ou ne faisaient pas partie de l'un des deux sites
Natura 2000. Cette nouvelle cartographie beaucoup plus fine
conduit donc à minimiser les surfaces par rapport aux
résultats obtenus par les DOCOB.
|

Figure
32 - État de conservation de l’habitat 3260 sur
le Loing et l'Epte en proportion surfacique
|
État
de conservation par rivière
Les végétations aquatiques sont globalement
jugées dans un état de conservation moyen dominant
sur les deux rivières, 49 % pour le Loing et 61 % pour
l'Epte. Toutefois, avec près de 39 % de végétations
en bon état, les communautés du Loing semblent
mieux structurées et les cortèges floristiques
plus saturés que sur l'Epte, avec 24 % de végétations
en bon état de conservation. Les deux rivières
présentent une faible proportion, entre 10 et 15 %,
de végétations en mauvais état de conservation.
Le nombre de végétations différentes
rencontrées est plus important sur le Loing - 11 végétations
- que sur l'Epte : 7 végétations. Au contraire,
le recouvrement des végétations aquatiques est
plus important sur l'Epte avec 14,3 % de la rivière
couverte contre 10,1 % pour le Loing. Toutefois, ces deux
derniers paramètres semblent autant liés aux
caractéristiques écologiques propres à
chaque cours d'eau - largeur, éclairement, profondeur,
substrat... - qu'à son état de conservation
: trophie, connectivité, envasement...
Le
Loing, en tant que grand cours d'eau, présente plus
de niches écologiques favorisant la richesse en végétations
et en espèces mais les parties trop profondes du cours
d’eau n’abritent que peu d’herbiers. L'Epte
offre au contraire moins de niches écologiques mais
permet grâce à ses plus faibles profondeurs le
développement des végétations sur des
surfaces plus importantes. Il faut enfin tenir compte du développement
spatial très variable de ces végétations
en fonction de la saison et des années, les relevés
sur l'Epte ayant été réalisés
un mois plus tard que sur le Loing. Les végétations
rhéophiles du Batrachion fluitantis, indicatrices de
l'habitat, sont en meilleur état de conservation sur
le Loing, avec 41,5 % en bon état, que sur l'Epte,
avec seulement 22,4 % en bon état. L'écart entre
les végétations stagnophiles associées
est moins important entre les deux rivières, 34,5 %
sont en bon état sur le Loing contre 27,3 % sur l'Epte.
On remarquera la plus forte proportion de végétations
stagnophiles en mauvais état que de végétations
rhéophiles sur les deux rivières, avec 17,2
% contre 9 % sur le Loing et 20 % contre 12,5 % sur l'Epte.
L'état
de conservation de l'habitat 3260 Rivières à
renoncules n'est jamais optimal - note supérieure
à 90 - sur les deux rivières malgré leur
fonctionnalité totale sans perte d'habitat. Ceci s'explique
par le paysage fortement anthropisé et modifié
de plaine dans lequel elles s'écoulent. Les résultats
sur l'Epte (fig. 32) corroborent nos observations de terrain
avec une large dominance de surfaces dans un état correct
(66 %) avec des secteurs altérés (25 %) et dégradés
(9 %) principalement localisés sur le tiers aval du
cours d'eau, à partir de Gasny. Cette partie du cours
d'eau est la plus aménagée, la plus rectifiée
avec des tronçons plus courts qui causent une diversité
moins importante de la flore et des végétations.
L'état de conservation tronçon par tronçon
de cet habitat sur l'Epte est présenté en annexe
9. Il était jusqu'ici considéré comme
excellent sur le site de l'Epte francilien et moyen sur le
site haut-normand selon trois modalités inscrites au
formulaire standard de données : excellent, bon, moyen.
Les résultats étaient donc opposés entre
deux sites qui se juxtaposent pourtant à peu près,
en prenant chacun une des berges de la rivière (annexe
1).
Les
résultats pour le Loing (fig. 32) sont plus contrastés
avec une importante proportion surfacique de l'habitat en
état correct (40 %) mais également en état
dégradé (44 %). Les secteurs les plus dégradés
se situent au niveau des portions canalisées - Nemours
et aval - et rectifiées du Loing. L'alternance de tronçons
très longs et très courts causée par
la densité des ouvrages par endroits créé
également une hétérogénéité
avec des tronçons dans des états de conservation
opposés qui se juxtaposent. L'état de conservation
tronçon par tronçon de cet habitat sur le Loing
est présenté en annexe 8. Il était jusqu'ici
considéré comme bon sur l'ensemble des rivières
du Loing et du Lunain avec une typicité moyenne et
un intégrité de structure bonne par le document
d'objectif.
|


source
: DRIEE, 2015

|
Localisation
du sites Natura 2000
Vallée de l'Epte francilienne et ses affluents
(cercle rouge)
Localisation
du sites Natura 2000
Rivières
du Loing et du Lunain (cercle
rouge)
|
 
Exemples d'hydrosystèmes
: non fonctionnel (à gauche) en vallée de l'Yerres
(77)
et fonctionnel (à droite) en vallée de l'Epte (95)
|
Les deux rivières étudiées sont complètement
fonctionnelles, présentent une diversité végétale
importante et des états de conservation plutôt favorables
par rapport au reste du réseau hydrologique francilien.
Malgré cela, de nombreuses atteintes et menaces pèsent
actuellement sur ces cours d'eau. La rectification
de leurs cours, la canalisation et la présence de nombreux
ouvrages ont fortement limité la dynamique fluviale avec
une disparition progressive des annexes hydrauliques - méandres,
anses, bras secondaires, mortes... - conduisant à l'envasement
des rivières et à l'érosion des berges, comme
sur la partie aval
de l'Epte. Le contexte d'agriculture intensive et d'urbanisation,
notamment pour le Loing, où ces rivières s'écoulent
provoque également leur pollution
et leur eutrophisation. Enfin, la boisement de plus en plus important
des berges sur l'ensemble de l'Epte et sur une partie du Loing
limite les
possibilités d'expression des végétations
aquatiques. Comme le disaient Muller & Haury, s’il
s’avère que l’hydrologie gouverne assez largement
le développement et la dynamique de ces phytocénoses
[aquatiques], des erreurs manifestes, à la fois de gestion
physique de l’habitat - curages importants, implantation
de barrages, boisement excessif des berges des ruisseaux - et
d’altération de la qualité de l’eau,
sont encore à déplorer dans de nombreux sites.
Tous ces facteurs conduisent vers une convergence trophique et
écologique, une homogénéisation et une perte
de biodiversité. La conservation de
l'habitat 3260 rivières à Renoncules sur
ces deux cours d'eau doit donc passer par des mesures fortes d'amélioration
de leur qualité écologique
par l'effacement d'ouvrages, la limitation des intrants voire
le reméandrement ou la remise en lumière des berges
par endroits. |
Évaluation
de l'état de conservation de l’habitat d’intérêt
communautaire
3260 Rivières à renoncules
Application à deux sites Natura
2000 d’Île-de-France : le Loing et l’Epten
Auteur
du rapport : Thierry FERNEZ, CBNBP, délégation
Île-de-France
Octobre 2016
Le
document téléchargeable ci-dessous a été
réalisé par le Conservatoire botanique national
du Bassin parisien (CBNBP), délégation Île-de-France,
sous la responsabilité de :
Frédéric Hendoux, directeur, Jeanne Vallet,
responsable de la délégation Île-de-France,
Conservatoire botanique national du Bassin parisien
Muséum national d’Histoire naturelle.
|
Le Conservatoire botanique national du Bassin parisien est
un service scientifique du Muséum national d’Histoire
naturelle.
Ses
missions :
- La
connaissance de l'état et de l'évolution
de la flore sauvage et des habitats naturels et semi-naturels
;
-
L'identification et la conservation des éléments
rares et menacés de la flore et de la végétation
in situ et ex situ ;
-
La fourniture aux pouvoirs publics - État, Collectivités
territoriales, Établissements publics… -,
aux gestionnaires et aux partenaires d'un concours technique
et scientifique pouvant prendre la forme de missions d'expertise
;
-
L'information et l'éducation du public à
la connaissance et à la préservation de
la diversité végétale.
Sa
labellisation :
-
un agrément national conféré par
le ministère en charge de l’environnement
: JO du 07/07/1998, JO du 26/12/2003, JO du 17/05/2010.
Le Conservatoire intervient sur un périmètre
constitué de quatre régions - Bourgogne, Centre,
Champagne-Ardenne, Île-de-France -, correspondant
au coeur du Bassin parisien.
cbnbp.mnhn.fr
|
Évaluation
de l'état de conservation
de l’habitat d’intérêt communautaire
3260
Rivières à renoncules |
|
Inventaires
de terrain :
Thierry Fernez & Julien Mondion, CBNBP ; Alexandre Ferré
& Klaire Houeix, FDAAPPMA 77 ; Frédéric
Asara & Jérôme Hanol, ANVL ; Céline
Przysiecki, Nicolas Fleury, Evéa Mautret, Florie Swoszowski,
Nolwenn Quilliec & Alicia Kaci, PNRVF ; Olivier Patrimonio
& Sylvie Forteaux, DRIEE-IF ; Yves Chardon, CAPE 27 ;
Antoine Verny, CENHN.
Rédaction et mise en page : Thierry Fernez
Relecture et avis : Sophie Auvert, Gaël Causse, Leslie
Ferreira, Olivier Patrimonio, Maëlle Rambaud, Jeanne
Vallet, Jérôme Wegnez
Cartographie : Leslie Ferreira, Marlène Toulet
Collaborateurs techniques :
Parc naturel régional du Vexin français, Fédération
de Seine-et-Marne pour la pêche et la protection du
milieu aquatique, Association des naturalistes de la vallée
du Loing et du massif de Fontainebleau, Communauté
d'agglomération des portes de l'Eure, Conservatoire
d’espaces naturels de Haute-Normandie |
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