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La Bièvre, affluent de la Seine, a été fortement
canalisée et rectifiée au fil des siècles, puis entièrement
recouverte et transformée en
canalisations pour les eaux usées et pluviales dans sa partie aval
au cours du XXème siècle. Plusieurs opérations de
réouverture sont menées depuis le début des années
2000, dans le secteur du Val-de-Marne principalement. Les fortes contraintes
liées à l'urbanisation, les coûts associés,
et une gouvernance locale complexe et évolutive empêchent
d'envisager à court terme le rétablissement d'une continuité,
et l'atteinte d'une bonne qualité écologique du cours d'eau.
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Zoom
sur… Jouy-en-Josas (78) : la Bièvre refait surface
pour un territoire plus résilient
Tronçon
par tronçon, la Bièvre revoit la lumière
en Île-de-France après avoir été recouverte
de goudron il y a cinquante ans. Cet affluent de la Seine est
déterré par portions dans le cadre de projets de
renaturation de la rivière afin de protéger la Vallée
de la Bièvre contre les crues, relever le défi du
retour de la nature en ville, et de la lutte contre les ilots
de chaleur urbains. Nouvelle réouverture de La Bièvre
: à Jouy-en-Josas, dans les Yvelines, en mai 2021. |
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| Ville
après ville, la Bièvre avance à ciel ouvert,
pas toujours dans son lit naturel, mais via un parcours urbain
qui respecte une logique environnementale et hydraulique et nécessite
des prouesses techniques.
Depuis
près de 20 ans, collectivités locales, syndicats
de rivières, établissements publics territoriaux
et associations œuvrent pour la renaissance progressive de
ce cours d’eau, long de 36 km, qui prend sa source à
Guyancourt, traverse cinq départements – Yvelines,
Essonne, Hauts-de-Seine, Val-de-Marne et Paris – et 16 communes,
avant de finir sa course enterrée dans les réseaux
de la capitale sur une quinzaine de kilomètres. Exploitée
par les artisans et les industries, des meuniers aux blanchisseuses
en passant par les tanneurs, les teinturiers, les abattoirs, la
Bièvre a été enterrée, canalisée,
détournée et recouverte aux abords de Paris pour
des raisons sanitaires aux XIXe et XXe siècles, raconte
Hervé Cardinal, directeur des services techniques du Syndicat
Intercommunal pour l’Assainissement de la Vallée
de la Bièvre (SIAVB). Sa remise à l’air
libre est née de la volonté des acteurs locaux d’adapter
la ville au changement climatique. Il s’agit d’une
démarche partenariale en faveur du retour de la nature
en ville au bénéfice des habitants et de l’environnement.
La
première réouverture de la Bièvre a eu lieu
à Massy en 1999, puis, à Fresnes en 2002. Elle est
réapparue à L’Haÿ-les-Roses en 2014,
à Igny et à Bièvres en 2019 et à Arcueil
et Gentilly, entre 2020 et 2021. La dernière mise en lumière
de la Bièvre a été réalisée
à Jouy-en-Josas en mai 2021, entre le parking de la gare
et le centre commercial du Josas, au niveau du boulodrome, sur
un linéaire de 140 mètres. |

Avant
les travaux ©
SIAVB |

Elle fait son retour à ciel ouvert été
2022
© SIAVB
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Pendant
les travaux ©
SIAVB |
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Fin des
travaux ©
SIAVB |
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À
Jouy-en-Josas, le coût de l’opération pour
la remise en lumière de la Bièvre s’est
élevé à 296 845€ HT,
et a bénéficié d’une aide financière
de l’agence de l’eau Seine-Normandie de 208 907
€ HT.
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| La
Bièvre à Jouy-en-Josas (78) ©
SIAVB
La
remise en lumière de la Bièvre inspire de la fierté
à Hervé Cardinal : L’objectif est ambitieux
car c’est un long travail d’études, de réflexions,
de concertations qui est mené pour chaque tronçon.
Il faut sensibiliser aussi la population, pas toujours convaincue
de la nécessité du retour en ville de la Bièvre.
Chaque tronçon réalisé représente
cependant une avancée pour l’environnement, la qualité
de vie sociale et la santé ! |
Un
tronçon par an : un objectif ambilitieux !
Le
projet de renaissance de la Bièvre sur ce secteur fait
partie intégrante de la volonté globale de reconquête
du cours d’eau à l’échelle de la Vallée
de la Bièvre, afin de lui permettre de retrouver une bonne
qualité des eaux, un lit de rivière propice à
la biodiversité, et de recréer une zone naturelle
préservée et accessible aux habitants. Cette réouverture
contribue également à lutter contre les ilots de
chaleur urbains en périodes de canicule, du fait du rafraichissement
procuré par l’évaporation de l’eau.
En d’autres termes, précise Hervé
Cardinal, il s’agit de concilier les usages écologiques,
récréatifs, de déplacements, et de redonner
un sens naturel à la Bièvre en plein cœur de
ville.
Au-delà
de la réappropriation et de la redécouverte de cette
rivière, enfouie par le baron Haussmann pour assainir Paris,
la renaturation du cours d’eau vise à aboutir à
une gestion durable de la rivière. Que ce soit en matière
de gestion du risque d’inondation, d’amélioration
du cadre de vie, d’intégration de la rivière
dans la ville, de réhabilitation du patrimoine ancien,
chaque sortie de terre de la Bièvre est pensée de
façon à générer des gains écologiques
pour s’adapter au changement climatique, explique le
directeur des services techniques du SIAVB. La création
d’îlots de fraicheur, des aménagements de zones
d’expansion de crues, des plantations, le retour d’un
habitat naturel, sont autant d’actions associées
au chantier global de réhabilitation de la Bièvre,
dont les opérations s’inscrivent dans le cadre du
Contrat de Territoire Eau et Climat du Bassin de la Bièvre
2020-2024, signé entre le SIAVB et l’agence de l’eau
Seine-Normandie, et du Plan de Relance de l’agence de l’eau.
A
Jouy-en-Josas, les travaux, particulièrement techniques,
ont consisté à sortir la rivière de sa galerie
souterraine par des opérations d’abattage, de débroussaillage,
de déblaiement, et de démantèlement partiel
de la galerie au niveau des reconnexions amont et aval du cours
d’eau. Un nouveau lit a été créé,
en respectant les critères de restauration hydromorphologiques
des cours d’eau – diversification des habitats et
des écoulements –, les berges ont été
végétalisées, de nouvelles connexions ont
été réalisées, les arrivées
des eaux pluviales ont été reprises, et une passerelle
piétonne a été construite. Le coût
de l’opération s’est élevé à
296 845€ HT, et a bénéficié d’une
aide financière de l’agence de l’eau de 208
907 € HT.
Avec
l’objectif affiché de renaturer un tronçon
de la Bièvre par an, le SIAVB travaille sur d’autres
projets de réouverture, pour baisser les températures
et restaurer la biodiversité en milieu urbain : Bièvres,
Buc, Les Loges-en-Josas sont dans les starting-blocks. La Métropole
du Grand Paris, la Ville de Paris et d’autres opérateurs
sont aussi à la manœuvre à l’aval du
bassin versant : Antony, Cachan, le parc Kellermann dans le XIIIe
arrondissement de Paris… |
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Au
bord de la Bièvre, XIIIe siècle
Les
tanneries
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| La
Bièvre, rivière disparue |
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| Les
Parisiens eux-mêmes l’ont oublié, mais il n’y
a jamais eu qu’un seul cours d’eau naturel à
Paris. Outre la mythique Seine, fleuve qui a nourri les premiers
parisiens, existait en effet jusqu’au début du XXe
siècle la Bièvre, rivière de 33 kilomètres,
qui prenait sa source dans les Yvelines, et se jetait dans la
Seine au niveau de la gare d’Austerlitz.
Aujourd’hui,
seule la Bièvre hors de Paris suit son cours naturel. Au
sein de la capitale, elle fut enterrée au XIXe siècle,
et ne restent plus que quelques plaques commémoratives
disséminées ça et là pour rappeler
son existence.
Entrant
dans Paris à la Poterne des Peupliers, la Bièvre
traversait les XIIIe et Ve arrondissements actuels. Dés
le XIe siècle, de nombreux moulins à eaux s’installèrent
aux abords de la rivière, suivis au XIe siècle par
des tanneurs et teinturiers, métiers qui nécessitaient
une utilisation continue d’eau.
À
la suite d’un décret (1336) qui obligea toutes ces
activités à s’installer hors de la ville –
exonérées par la même occasion des taxes et
impôts parisiens –, tous ces travailleurs se retrouvèrent
dans le XIIIe arrondissement actuel, situé à l’époque
au-delà de l’enceinte Philippe-Auguste.
Le
quartier connut dans les siècles suivants une urbanisation
fulgurante. En plus des moulins et anciens corps de métiers
arrivèrent des mégissiers, cordonniers, blanchisseurs,
tisserands… Ainsi que de nombreuses industries et manufactures.
La manufacture des Gobelins, atelier de teinture devenu manufacture
Royale des meubles et des tapisseries de la Couronne, en est le
plus prestigieux témoin visible aujourd’hui.
Malheureusement,
cette urbanisation excessive surexploitait la rivière Bièvre,
et ce qui n’était qu’une simple source d’eau
potable devint avec le temps un cloaque pollué et puant,
potentiellement source d’épidémies. Les grands
travaux du Baron Haussmann, dont l’un des principaux objectifs
était d’assainir Paris, eurent raison de la Bièvre.
Elle
fut bétonnée et enterrée, et ne chemine désormais
plus vers la Seine, mais vers les égouts de Paris. |
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La
Bièvre aujourd'hui,
dans Paris
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| Il
n’existe pas aujourd’hui de tracé vraiment
attrayant pour une balade sur les traces de la Bièvre.
Dans le XIIIe arrondissement, vous trouverez néanmoins
quelques sites d’intérêt :
- Aux
alentours de la Butte aux Cailles, les jolis villages de la
Cité Florale et le quartier des Peupliers ont été
construits sur les terrains asséchés de la Bièvre.
- Le
joli Square René le Gall a été construit
sur une ancienne île que formaient deux bras de la Bièvre.
La rue de Croulebarbe suit d’ailleurs à quelques
détails près le tracé d’un de ces
bras.
- Boulevard
Auguste Blanqui, entre les stations aériennes Corvisart
et Glacière, se séparaient les deux bras de la
Bièvre. Vous pouvez y voir une plaque commémorative.
unjourdeplusaparis.com
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.Réouverture
de la Bièvre aval en milieu urbain
-.Remise
à ciel ouvert d’un cours d’eau
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Une augmentation de la biodiversité
faunistique et floristique est constatée dans
le parc des Coteaux suite à la réouverture,
avec notamment une bonne implantation de la végétation
hélophyte, la présence d'herbiers aquatiques,
d'odonates et de nouvelles espèces d'oiseaux.
La pêche électrique réalisée
en 2023 par la fédération de la pêche
a permis de capturer 15 épinoches, 6 goujons
et 2 pseudorasbora - espèce invasive -, tous
exclusivement juvéniles, témoignant
d'une colonisation récente du linéaire
réouvert. Ont également été
recensés par le Département des bouvières
et des chevaines. Les observations mettent cepndant
en évidence des dépôts vaseux
et la présence d'algues filamenteuses, témoignant
d'une qualité encore fragile de l'eau, mais
le peuplement en bonne santé donne des signes
encourageants de la capacité biogène
du cours d'eau découvert. Sur la base des 4
indices biologiques réalisés en 2023,
la station présente un état biologique
médiocre pour tous les compartiments étudiés.
Concernant la physico-chimie, les bilans sur les paramètres
oxygène et nutriments - nitrates, nitrites,
phosphore… - présentent une qualité
dégradée, liée notamment aux
mauvais branchements restants sur la partie canalisée
en amont. Les paramètres d'acidification (pH)
et de température montrent en revanche des
résultats bons à très bons sur
la station.
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